C'est en pleine guerre de sécession que Don Siegel nous envoie avec Les Proies en 1971, récit narrant les péripéties d'un soldat nordiste blessé à la jambe dans un pensionnat sudiste pour jeunes filles.
Don Siegel quitte le western et le polar pour se lancer ici dans un drame intimiste en pleine guerre, placé sous le signe de la violence et la démence. L'oeuvre ne manque pas de puissance, avec une ambiance adéquate, vénéneuse, souvent dérangeante et surtout ambiguë, où Siegel s'appuie sur des personnages intéressants et fouillés, tout comme l'évolution de ceux-ci, où chacun aura des caractéristiques particulières sans pour autant tomber dans la caricature ou l'excès.
C'est aussi la nature humaine qui intéresse le futur metteur en scène de Dirty Harry, ses pulsions, parfois même incestueuses, les masques que les humains portent et la violence pouvant parfois s'y cacher. Il s'appuie sur une vraie qualité d'écriture, tant le déroulement que les personnages, qu'il sublime avec une mise en scène envoûtante en faisant ressortir tout l'intérêt, la psychologie, l'ampleur dramatique et la puissance de l'oeuvre.
Le contexte de l'oeuvre est aussi ionnant, que ce soit celui de l'opposition entre le nord et le sud, ou de la psychologie humaine, notamment à travers le portrait de Clint Eastwood. Ce dernier trouve-là un rôle surprenant dont il maîtrise toutes les ficelles pour l'incarner à merveille, tandis que les actrices féminins sont toutes parfaites. Siegel les dirige avec immense brio, démontrant à nouveau un savoir-faire, qu'il soit technique, dans la direction, la maîtrise de l'image ou encore la mise en place d'une tension de plus en plus forte.
Don Siegel propose avec Les Proies une oeuvre remarquable, dérangeante et d'une puissance, notamment dramatique, forte où il démontre un vrai savoir-faire et dirige de talentueux comédiens, Clint Eastwood en tête.