Les assassins de l'ordre

Film de Marcel Carné sorti en 1971 que je viens de découvrir. Il semblerait qu'il n'ait pas bénéficié de beaucoup de publicité ni de ages à la télévision depuis sa sortie.

Le sujet évoque les difficultés, en 1971, de mettre en cause et de juger des policiers soupçonnés d'avoir é à tabac et tué un suspect lors d'un interrogatoire musclé.

Le scénario est inspiré d'un livre de Jean Laborde, journaliste et chroniqueur judiciaire mais aussi romancier. Il est aussi connu comme un auteur de romans de série noire sous le nom de Raf Valet ou Jean Delion (Adieu Poulet, Mort d'un pourri, etc.).

Le roman est aussi basé sur un fait réel – analogue - qui s'est déroulé, lui, en 1946 dans la région de Chambéry.

Le film de Marcel Carné est intéressant à mettre en perspective avec ce qu'il se e aujourd'hui sur des sujets équivalents et d'en mesurer les écarts ou le chemin parcouru par la société. À l'époque, il n'y avait probablement pas autant de contre-pouvoirs face à certaines dérives de fonctionnement. 1971, trois ans après 1968, était bien entendu une période assez propice pour dénoncer la justice à plusieurs vitesses, les risques sur la démocratie de la collusion entre justice et police, etc… etc… Ce cinéma est dans une veine qu'a déjà emprunté Cayatte depuis les années 45 et que Boisset poursuivra.

Ceci étant, si le scénario reste très solide, notre Marcel Carné n'échappe pas à quelques maladresses qui font malheureusement apparaître un certain manichéisme. J'en vois deux au moins. La première à travers l'utilisation trop importante du mouvement spontané étudiant dans une logique d'opposition ou d'incompréhension étudiants vs adultes. La deuxième concerne le manque de nuance concernant les policiers. En effet, dans le film, on est trop tenté de généraliser le comportement des policiers à l'ensemble de la corporation. Ce qui nuit un peu à la qualité de la démonstration.

Enfin, le film est intéressant par les deux personnages qui s'affrontent entre le juge d'instruction (Jacques Brel) soumis à de multiples pressions et l'avocat des policiers, un ténor du barreau (Charles Denner). Les deux acteurs sont excellents, l'un qui se sait dans une partie difficile voire perdue d'avance, l'autre avec un cynisme vainqueur qui met une pression tous azimuts. Les deux personnages sont parfaitement crédibles et convaincants.

À noter aussi, une Catherine Rouvel remarquable dans son personnage de prostituée au grand cœur mais écartelée entre les diverses pressions exercées sur elle.

Parmi les seconds rôles, Michael Lonsdale, toujours excellent dans son personnage de commissaire (inculpé) tout en rondeurs et onctuosités …

Oui, film très intéressant et très bien interprété. Marcel Carné, à la fin de sa carrière, sait encore faire du cinéma, du bon cinéma.


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le 11 déc. 2024

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JeanG55

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