Parmi les cinéastes français qui ont émergé dans les années 70 (Tavernier, Miller, Corneau, ...), André Téchiné reste l'un des rares survivants, régulièrement actif, et parmi ceux dont il est inutile de s'interroger sur la qualité de ses réalisations. Les acteurs, et encore plus les actrices, l'adorent et il leur rend bien, en leur offrant des rôles fins et sensibles. Dans Les âmes sœurs, qui ne déparera pas dans sa filmographie, ce n'est pas tant l'amnésie que la relation entre un frère et un sœur qui est en jeu, un lien troublant que Téchiné explore avec une délicatesse et une sérénité dignes d'un Louis Malle. Au fil des années, son cinéma s'est épuré et a acquis une concision nouvelle (que l'on se souvienne du côté ampoulé de Barocco ou des Soeurs Brontë, par exemple), sans perdre de sa belle intensité psychologique. L'élégance est l'un des traits caractéristiques de la mise en scène de Les âmes sœurs, dans un cadre naturel qu'il chérit : les Pyrénées. Tous les personnages possèdent une dose non négligeable d'ambigüité, à commencer par ceux du duo principal mais le cinéaste sait aussi donner du sens à ceux qui les côtoient, tels le voisin désabusé (André Marcon, remarquable) ou la mairesse (Audrey Dana). Benjamin Voisin et Noémie Merlant, deux des plus éminents talents ayant éclos ces dernières années, font merveille, de par leur alchimie évidente, dans ce splendide concerto pour cordes sensibles.