Et on taira tous les aveux.
Par bien des points, le Verdict semble inspirer ce qui sera L’idéaliste de Coppola : regard sans concession sur le monde des avocats, détrousseurs de détresse, rédemption par une affaire démesurée où s’affronteront le pot de terre et le pot de fer, dans deux conceptions de la justice, celle de notre protagoniste conservant une dimension humaniste.
De ce point de vue, on peut considérer ce film comme l’un des plus convenus de Lumet (comme ce sera aussi le cas pour celui de Coppola). La trame bien connue n’offre pas de réelle surprise, même si l’acharnement à l’échec qui marque la quasi-totalité de la procédure est assez éprouvant et donne une image du système peu reluisante. On retrouve là des thèmes chers au réalisateur, qui de Serpico à Un après-midi de chien, en ant par Network, se plait à révéler les arcanes d’un système qui dévore les individus. Le lobbying, le travail de l’image, la présence médiatique ou le choix d’un noir dans l’équipe sont autant de leçons de communication et de cynisme qu’on connait bien chez Lumet. La collusion complexe entre les intérêts financiers et les idéaux humanistes contamine aussi le récit. Souvent, on reproche à Galvin de vouloir aller au procès par avidité, comme s’il n’était plus possible, dans un tel système, d’agir pour le bien et la justice, « to make things right ».
Cette ambivalence est renforcée par ce qui fait la principale différence avec les films classiques du genre, dans lesquels on peut aussi ranger Erin Brokovich : le portrait d’un homme brisé, alcoolique et inefficace, rendu crédible et touchant par Paul Newman remplaçant Redford qui n’avait osé se compromettre sur un tel rôle.
Dans ce monde où tout s’achète et se manipule (jusqu’aux excès, la romance entre Newman et Rampling n’étant pas particulièrement subtile en matière de démonstration), c’est par le regard hagard d’un homme en attente de rédemption que l’émotion va pouvoir sourdre. De longues scènes silencieuses, de beuverie ou de flipper, mettent en place une solitude que va combler un motif frappant, celui de l’image, un polaroid de la victime qui va soudain faire revivre la vocation à plaider.
Pour ce parcours et ses accidents, pour l’interprétation à la fois sobre et intense, Le Verdict est un film attachant, mais tout de même à l’ombre de bien des chefs-d’œuvre de Lumet.
Et oui, Djee, Paul Newman joue bien au flipper. A un moment, même, il gagne le super bonus.
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