Et sinon, où en est-on du côté de la gentille comédie française à papa ? Ma foi, elle ne se porte pas trop mal, et les méthodes d’embaumement fonctionnent plutôt bien.
Soit cette gentillette histoire très théâtrale, qui joue dans un premier temps la carte du littéraire (avec notamment, une parodie du générique des Liaisons Dangereuses), jusque dans ses répliques qu’on croirait sorties d’une pièce de Marivaux. Le jeu sur l’écriture est plutôt sympathique, le personnage de Mélanie Laurent se piquant d’inventivité en créant de toute pièce une figure de héros pour sa sœur abandonnée par un goujat. Son retour inopiné et l’apprentissage du rôle qu’il doit incarner dans un duo forcé avec l’auteure de sa vie est l’occasion de scènes assez enlevées, et promet une intrigue bien rythmée.
Le film entier repose sur son comédien : Jean Dujardin, qui fanfaronne tel un Cyrano de seconde zone, sait comme toujours communiquer son plaisir, et le sujet même du récit ne traite pas d’autre chose : montrer la capacité de séduction d’un acteur en représentation, par l’intensité de sa présence, ses compétences d’improvisation et le déploiement de son charme. L’intérêt réside ici dans la réelle facette de son personnage, veule, escroc et menteur invétéré.
La réalisation, d’une platitude assumée, ne s’embarrasse d’aucune inventivité : on retrouve ces éclairages trop clairs, cette paresse du montage, cette musique d’ascenseur et cette atmosphère scolaire qui cherche avant tout à faciliter la lecture du spectateur. Quelques plans un peu plus dynamiques dans la canonnade finale viennent un peu relever le niveau sur la fin, mais Laurent Tirard reste aussi anonyme que possible.
Si le duo central fonctionne plutôt bien, on ne peut pas en dire autant de son entourage : les personnages secondaires sont assez catastrophiques (le mari s’en sort vaguement, car on lui a accordé une ou deux scènes), cristallisant à eux seuls tout ce que la comédie française peut concentrer de caricatures et de médiocrité : femmes qui minaudent pour nous prouver le charme du héros, visages outranciers, réactions prévisibles… c’est toujours aussi désagréable de se sentir considéré comme un demeuré à qui l’on explique l’impact de chaque réplique.
Autre source de malaise, cette volonté de « moderniser » la comédie pour paraitre dans l’air du temps : une référence à Macron (Car c’est notre combat, avec la voix qui fout le camp), aux pyramides de Madoff, une nymphomane à tendance SM… c’est terriblement plaqué, peu pertinent et plus embarrassant qu’autre chose.
Dujardin est effectivement une belle relève au Belmondo qui fit la gloire du cinéma français en son temps. Mais qu’on ne lui en veuille pas trop : Jean-Paul lui-même a fait pas mal de films qui méritent l’oubli.