Le Magicien d'Oz est une odyssée chromatique où la transition du sépia au Technicolor ne fait pas qu'éblouir : elle incarne l'essor de l'imaginaire, transportant Dorothy du terne quotidien à l'univers étincelant d'Oz. Cette audace technique symbolise l'évasion et la redécouverte, inscrivant l'imaginaire comme un espace où tout devient possible.
Les effets spéciaux, encore rudimentaires, tissent un décor d'illusions : les tornades, les entrées spectrales de la sorcière et la fantaisie de la Cité d’Émeraude émergent de maquettes et de câbles habilement masqués. La route de briques jaunes, avec ses décors théâtraux et ses paysages peints, invite le spectateur dans un univers aussi fragile qu'inoubliable.
Chaque personnage rencontré sur ce chemin initiatique reflète une facette de Dorothy, qui part en quête initiatique. L'Épouvantail incarne l’intelligence, le Lion le courage, et le Bûcheron en fer-blanc, l’amour. Quant aux souliers de rubis, ils sont l’allégorie ultime de l’autonomie : Dorothy, sans le savoir, détient depuis toujours le pouvoir de retourner chez elle, suggérant que la clé du retour à soi réside dans l'acceptation de son propre potentiel.
Derrière le masque du Magicien, dont l'omnipotence n’est qu’un jeu d’illusions, se profile une critique de l’autorité factice et des apparences trompeuses. Ce despote démasqué nous rappelle que le vrai pouvoir réside dans la lucidité et le déement des simulacres.
Certaines lectures font de ce conte une fresque sociale de l’Amérique de l’entre-deux-guerres, où chaque protagoniste incarne une part d’une nation en crise : l’Épouvantail symbolise l'agriculteur en détresse, le Bûcheron les ouvriers désillusionnés, et le Lion l'audace étouffée des leaders politiques. À l'image de la Grande Dépression, Oz devient alors le reflet d'un pays à la recherche d’espoir et d'une destinée nouvelle.