Le Jeu de la reine
6.3
Le Jeu de la reine

Film de Karim Aïnouz (2023)

Voir le film

A en perdre la tête !

Les enfants, répétez après moi, "hommes, méchants", "femmes, gentilles"... allez, plus fort, "HOMMES, MÉCHANTS", "FEMMES, GENTILLES". C'est super, vous avez bien retenu votre catéchisme.


Quoi, mon premier paragraphe est lourd ? Ce n'est pas moi qui ai commencé, c'est Karim Aïnouz.


Alors, Firebrand nous conte l'interminable crépuscule du règne du tyrannique Henry VIII en suivant l'histoire de sa sixième et dernière épouse, Catherine Parr. Ce qui était a priori une idée superbe d'évoquer cette figure méconnue, très négligée jusque-là par le cinéma, qui a pourtant eu un rôle essentiel pour l'avenir de son pays.


C'est quand même la femme qui a réussi à survivre à un être impotent, à la jambe en putréfaction, mais qui n'a jamais été aussi dangereux, aussi paranoïaque, avec un if soulignant qu'il a la décapitation très facile (les deuxième et cinquième Mesdames Tudor peuvent en témoigner !), qui a réussi à gérer avec efficacité une régence lors d'une absence de son cher mari, qui a influencé sa belle-fille Elisabeth dans sa manière d'exercer le pouvoir, qui a contribué à intégrer les princesses dans l'ordre de succession au trône. C'est dire qu'elle était habile non seulement pour ne pas perdre la tête dans ce milieu impitoyable qu'était la Cour à l'époque, mais aussi pour manipuler l'ogre royal.


Bon, c'est bien beau, Karim, de vouloir dépeindre ce personnage comme une proto-féministe qui va sauver sa nation de la tyrannie masculine et lui apporter la Liberté, avec un grand L, après un obscurantisme dû à l'infâme patriarcat, composé uniquement d'êtres avec une paire lamentable entre les jambes, au pire cruels, au mieux veules et traîtres, un obscurantisme dont les seules victimes sont les femmes, évidemment. C'est bien beau de vouloir balancer du girl power dans la tronche, à nous, pauvres pêcheurs forcément machos, avec chanson moderne en supplément lors du générique de fin. C'est bien beau de faire dans le manichéisme débile de la guerre des sexes.


Mais dans ce cas-là, il faut mettre en scène une héroïne qui soit un minimum intelligente, qui soit constamment sur ses gardes, qui ne soit pas d'une inconséquence confinant à la stupidité la plus profonde. La vraie Catherine Parr a tenu trois ans et demi. Ce qui est très loin d'être un mince exploit (franchement, respect !). Je ne vois pas comment il pourrait être crédible que celle du film ait pu tenir plus d'une semaine sans rencontrer la hache du bourreau.


Même au sein de sa logique, complètement dénuée de subtilité, se souhaitant féministe, ce film est con.


Et ce n'est pas dans une mise en scène, sans la moindre once de créativité ou de beauté, ni dans une Alice Vikander qui n'a rien à jouer de consistant, ni dans un Jude Law qui en fait des tonnes dans le rôle du serial-épouseur, que ce long-métrage arrive à sauver quelque chose.

1
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Les meilleurs films de 2024

Créée

le 27 mars 2024

Critique lue 2.5K fois

18 j'aime

11 commentaires

Plume231

Écrit par

Critique lue 2.5K fois

18
11

D'autres avis sur Le Jeu de la reine

A en perdre la tête !

Les enfants, répétez après moi, "hommes, méchants", "femmes, gentilles"... allez, plus fort, "HOMMES, MÉCHANTS", "FEMMES, GENTILLES". C'est super, vous avez bien retenu votre catéchisme. Quoi, mon...

Par

le 27 mars 2024

18 j'aime

11

"Pas ce soir, t’as la gangrène"

Signe des temps, le point de vue féministe sur les récits historiques est désormais un angle revigorant pour décaper les grands classiques du patriarcat. Alors que les biopics font la part belle aux...

le 2 avr. 2024

11 j'aime

1

Critique de Le Jeu de la reine par murron

Catherine Parr, grand nom de l’Histoire au temps de Henri VIII, ou l’une des seules épouses qui a pu échapper à la cruauté barbare de l’ogre roi. Un film féministe, adapté de l’œuvre d’Elizabeth...

Par

le 24 mai 2023

10 j'aime

2

Du même critique

Chantons sous la pisse !

L'histoire du septième art est ponctuée de faits étranges, à l'instar de la production de ce film. Comment un studio, des producteurs ont pu se dire qu'aujourd'hui une telle œuvre ambitieuse avait la...

Par

le 18 janv. 2023

317 j'aime

24

Le Comte n'est pas bon !

Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise adaptation, il y en a des fidèles et d'autres qui s'éloignent plus ou moins du matériau d'origine. Et la qualité d'un film, issu d'une adaptation...

Par

le 1 juil. 2024

247 j'aime

58

Un melon de la taille d'un champignon !

Christopher Nolan est un putain d'excellent technicien (sachant irablement s'entourer à ce niveau-là !). Il arrive à faire des images à tomber à la renverse, aussi bien par leur réalisme que par...

Par

le 20 juil. 2023

220 j'aime

30