Dyptique composé de deux moyens-métrages, The Adventures of Ichabod and Mr. Toad tient du « deux salles, deux ambiances » d’un bout à l’autre : d’abord parce que les mésaventures du crapaud obsessionnel s’arrogent une vive nostalgie me concernant, a contrario de ce maître d’école jusqu’alors inconnu ; ensuite au regard de leurs prétentions respectives, l’un versant dans le vaudevillesque enjoué, l’autre investissant les quartiers d’un Sleepy Hollow versatile.
Ils partagent toutefois deux traits communs : leurs origines littéraires et celui de l’efficacité sans atteindre les sommets. Et, en comme en écho au constat préalable, le contraste qu’ils imposent permet aussi d’ériger le dyptique par-delà ses limites narratives, le muant en un ensemble méritant amplement sa place parmi les Classiques d’animation du studio aux grandes oreilles.
En guise d’approfondissement, c’est donc Mr. Toad qui ouvre le bal : davantage dépensier que fortuné, le baron est un crédule cédant à l’envie aux sirènes de ses ions, toutes plus extravagantes et agères les unes que les autres. Source intarissable d’inquiétudes pour ses plus proches amis, il imprime un rythme trépidant à cette revisite de La Mare aux grenouilles : les gags sont de surcroît de bon ton, nous ons ainsi outre ses quelques largesses.
S’il fallait toutefois retenir une ou deux petites choses dénotant, ce serait les suivantes : d’abord les quelques variations d’atmosphère dont sait faire preuve le court-métrage, l’emprisonnement puis l’échappée du baron rompant drastiquement avec l’empreinte bon enfant à l’œuvre. Ensuite, la triplette que compose Angus, Rat et Mole fait de l’amitié une force intangible mais polymorphe, capable de s’exprimer d’autant de manières que ses acteurs sont différents ; une manière qui plus est de ne pas justifier aveuglément, ni condamner sans pardon, le comportement destructeur de leur comparse d’amphibien.
Puis, voici venir le fameux Ichabod Crane : si ses premiers pas résonnent d’un air léger, presque badin, conforté par quelques chansons entêtantes, les manières du personnage et la finalité du court-métrage vont finalement nous prendre à revers. De fait, dans le sillage d’un narrateur loquace, cette adaptation de La Légende de Sleepy Hollow se joue littéralement de la perception du spectateur, d’abord enclin à s’attacher au lettré et délicat instituteur : l’anthèse virile qu’est Brom Bones parachève cette mise en bouche manichéenne, laissant ainsi croire que le visiteur triomphera de son adversaire avec les honneurs.
Mais que nenni, Ichabod faisant de son « amour » pour Katrina Van Tassel un costume d’apparat fourbe, l’appât du gain prédominant parmi les desseins de ce grand dadais habile. Le rapport de force n’est ainsi pas loin de s’inverser, la brute des débuts s’attirant finalement notre sympathie tandis qu’Ichabod multipliera les stratagèmes pour parvenir à ses fins. Dès lors, son ultime arc ne manque pas de nous estomaquer en faisant honneur aux aspirations fantastiques de l’œuvre originale, ce périple cauchemardesque instigué par un Cavalier sans tête tenace s’arrogeant un sursaut d’épouvante gentillet mais véritable.
C’est ainsi que, contre toute attente me concernant, ce second court-métrage hisse pour de bon le « film » au rang des franches bonnes surprises : entres plaisantes retrouvailles et découverte probante, le plaisir fut doublement au rendez-vous.