Henri-Georges Clouzot, à qui l'on doit notamment Le salaire de la peur ou Le Corbeau, aborde la dernière partie de sa carrière et met en scène La Vérité, le procès édifiant d'une femme que tout accuse.
Tout d'abord, c'est assez fluide et pertinent, le procès représente la trame principale, et l'histoire est racontée chronologiquement à travers plusieurs flash-back. Dès le début, Clouzot nous ionne, La Vérité est réussie sur tous les points, que ce soit les personnages, l'histoire en elle-même, la manière de la raconter, les rebondissements souvent bien pensés ou encore ses réflexions, particulièrement sur les mœurs sociales ou la capacité de jugements.
Dominique, l'accusée à l'attitude fréquemment oisive, provocante ou sensuelle, interroge, dès le début, sur sa personne, ses motivations, et elle devient de plus en plus fascinante, notamment lorsque Clouzot développe les liens avec sa sœur au caractère diamétralement opposé ou avec Louis, son amour, possessif, jaloux et tendu. Les autres personnages participent à sa fascination, que ce soient ceux qui vont la côtoyer ou ceux qui vont la juger. Les dialogues participent à cette réussite, ils permettent de faire comprendre bien des choses sans directement les montrer, et c'est naturel, faisant ressortir le choc entre les générations et les modes de vie.
Clouzot maintient le suspense de bout en bout, rend son film intense lorsque c'est nécessaire. En effet, en plus de ne pas manquer d'humour, de charme, d'intelligence et de fraîcheur, il arrive à donner une réelle intensité dramatique à son récit. Sa maîtrise technique est remarquable, avec une mise en scène simple, mais immersive, au plus près de la protagoniste, tandis que la photographie en noir et blanc est superbe. La distribution est parfaite, du plus petit au plus grand rôle, chaque acteur arrive à rendre son personnage crédible et à donner de l'intensité à leurs séquences.
Brigitte Bardot, parfois énervante, trouve là l'un de ses plus beaux rôles et donne une vraie crédibilité à son personnage, tour à tour sensuelle, charmante, touchante et finalement fascinante et ionnante, tandis que Sami Frey est aussi remarquable, toujours juste et jamais trop théâtral. Les autres interprétations, à l'image de Charles Vanel mais surtout Paul Meurisse dans les rôles des avocats, sont irréprochables.
Clouzot signe avec La Vérité un grand film, brillant dans le fond comme dans la forme, sachant être tour-à-tour sensuel, provoquant, drôle, intense ou touchant, mais surtout ionnant et captivant d'un bout à l'autre, tout en étant porté par d'excellents comédiens.