Malgré son titre, l’action de ce film ne se situe pas en Argentine. La Pampa est le nom d’une association qui gère un terrain de motocross qui sert de terrain d’entrainement pour les mordus de cette discipline, en particulier pour un groupe de jeunes. Parmi eux le blond peroxydé Jojo (Amaury Foucher) et le brun Willy (Sayyid El Alami), potes depuis de nombreuses années. Jojo court pour un championnat où il est suffisamment bien placé pour espérer le titre. Il est entrainé par son père (Damien Bonnard), un ionné.
Pour son premier long métrage de fiction, le réalisateur Antoine Chevrollier ne se contente pas d’un scénario qu’il cosigne avec Bérénice Boquillon et qui s’avère captivant. Il met en scène deux adolescents de caractère qu’on voit évoluer dans un milieu rural où de nombreux personnages interviennent et interagissent. Ainsi, le caractère du père de Jojo s’avère déterminant pour l’intrigue. Si le père pousse le fils, c’est très probablement pour obtenir par son intermédiaire le succès qu’il n’a pas eu. Et comme ce n’est pas l’affreux Jojo mais un jeune doué, il lui demande la perfection. Or, comme on le voit parfaitement dans les séquences de courses, quasiment tout se joue au départ. On sent malheureusement très vite que la pression exercée sur Jojo est excessive (jamais un mot de félicitations…) Ceci dit, cette position d’un parent cherchant un succès sportif par procuration n’est pas spécialement originale.
L’intérêt du film est d’intégrer bien d’autres composantes, puisqu’il s’intéresse de près aux personnalités des uns et des autres. L’ambiance des courses (réussie) ne fait aucune ombre aux ambiances familiales. Ainsi, Willy est à cran chez lui et peu motivé par l’approche des épreuves du Bac. Il faut dire que son père est mort depuis dix ans, de maladie devine-t-on. Or, sa mère (Florence Janas) s’est trouvé depuis quelque temps un autre homme (Mathieu Demy) que Willy ne e pas de voir à la maison, malgré la bienveillance qu’il dégage.
Plus ou moins aussi mal à l’aise l’un que l’autre à la maison, on comprend que Jojo et Willy apprécient de se retrouver et de côtoyer ceux de leur génération, ce qui donne l’occasion de décrire les relations filles-garçons. Ainsi, la charmante Marina (Léonie Dahan-Lamort) ne laisse pas Willy insensible, malgré certaines différences : elle est aux Beaux-Arts à Angers et méprise ouvertement ceux qui s’amusent à colporter des ragots sur son compte juste pour la provoquer et ne réalisent pas quels dégâts ils peuvent occasionner. On voit donc un groupe de jeunes typiques, avec leurs comportements et leur vocabulaire. Ce qui amène à évoquer Mélody, diminutif Mélo (Axelle Fresneau) la petite sœur de Willy. Dans une ambiance familiale tendue, la faute au comportement à fleur de peau de Willy, on observe des frictions entre Willy et Mélo.
Celle-ci va jusqu’à le traiter de fils de pute, une expression qui sort par pur réflexe. Quand il le réalise, Willy esquisse un sourire en considérant que dans cette situation, c’est leur mère que Mélo insulte, leur mère que Mélo aime par-dessus tout.
La suite du film nous montre par ailleurs que les liens familiaux sont malgré tout assez forts, car Mélo accepte régulièrement les petites aides que Willy réclame ou dont il a besoin à l’occasion. Et, vis-à-vis de Willy l’incontrôlable, sa mère finira par se féliciter d’avoir à nouveau un homme à la maison. Car pour placer un interdit, à un moment les mots ne suffisent plus, il faut de la poigne. D’ailleurs, ce n’est certainement pas un hasard si Willy comme Jojo aiment le motocross. Le film le montre bien, avec son ambiance à bonne dose de testostérone, ce qui permet à ces jeunes garçons de trouver un terrain où s’affirmer. A ce propos, je recommande vivement aux mamans de se méfier de la séquence d’ouverture qu’elles risquent de très mal er.
L’amitié entre Willy et Jojo va se trouver confrontée à un gros imprévu qui nous fait d’ailleurs comprendre pourquoi Jojo peut se comporter en vraie tête brûlée. Le film surprend car on imaginait que, suite à une révélation inattendue, le silence serait de rigueur. Finalement non et l’amitié s’avère plus forte que tout. Il faudra un vrai drame pour la faire évoluer. Auparavant nous aurons droit à une escapade à Angers pour un aperçu de l’Apocalypse (la tapisserie).
Quelques points glissent trop facilement sur la fin. Mais il y a de la vie dans La Pampa, un film où on voit des yeux briller. Une réussite qui alterne intimisme et action (les courses et entrainements dans des séquences bien filmées), amitié, amour, trahisons et bassesses. Le tout est bien mis en valeur notamment par de jeunes interprètes bien investis qui vont jusqu’à s’avérer bouleversants. Et la musique signée du duo Sacha et Evgueny Galperine apporte un plus de qualité.