Ce film est l'un des moments-clés de l'école de Brighton et par conséquent des débuts du cinéma. L'inventeur Georges Albert Smith y reprend le principe de la prise de vue à l'intérieur de la prise initiale, déjà expérimenté dans L'Astronome Indiscret (1900). Le plan subjectif, 'individualisé' en fonction d'un protagoniste, vient de s'imposer. Cette innovation est généralement attribuée à La Loupe de grand-mère par erreur, probablement parce qu'il fait de son prédécesseur un brouillon. Lui ne contenait qu'un de ces plans et n'avait plus qu'à s'attarder sur cette vue originale ; par la loupe de grand-mère on en perçoit cinq.
Le quatrième est audacieux puisqu'il s'agit d'un gros plan sur l’œil de la vieille, alors qu'isoler des morceaux du corps a pu être tabou – la seule alternative observable dans les arts [en Occident où a été fabriqué le cinéma, du moins] jusqu'alors étant le portrait, avec le buste seul. D'ailleurs le reste du temps c'est encore le corps entier qu'on donne à voir dans ce métrage. Même Big Swallow (Williamson 1901) devient doublement sardonique.
Grandma Reading Glass n'est donc pas le premier film à exploiter le montage et le découpage comme on le lit parfois : la façon dont Méliès exploite le split-screen dans As Seen through a telescope et plus attractif que l'ensemble des productions de l'époque. Il est resté perdu jusqu'en 1960, date où on le retrouva dans la collection du photographe Peter Elfelt, pionnier du cinéma pour le Danemark (Kørsel med Grønlandske Hunde aka 'Traveling avec des chiens groenlandais' en 1897, Henrettelsen en 1903).
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