Un duo qui ne compte pas pour du beurre

Le prétexte de ce film est évident : réunir deux monstres sacrés de la comédie française et opposer leurs tempéraments et leurs origines. D’un côté, le Provençal Fernandel qui en fait des tonnes en beau parleur fainéant et, de l’autre, le Normand Bourvil qui s’échine à sortir de son caractère travailleur et sur le dos duquel on aime profiter de certaines choses. Chacun récite une partition qu’il connait par cœur conduisant à un duo mal assorti qui fait des étincelles. Si les deux acteurs ne se sont pas particulièrement bien entendus sur le tournage (Fernandel se montrant parfois condescendant à l’égard d’un acteur qui pourtant l’irait), leur complicité paraît cependant évidente dans de nombreuses scènes et concrétise l’alchimie espérée par le spectateur. L’illusion étant au rendez-vous, l’essentiel est assuré.


Pour mettre le tout en sauce, Gilles Grangier (qui a, notamment, beaucoup tourné avec Gabin ces années-là) connaît bien son métier. S’il s’appuie sur un scénario plutôt mince (et réécrit à plusieurs reprises) mais original, il exploite surtout parfaitement une galerie de personnages truculents et des situations caricaturales incontournables. De la partie de pétanque à celle de pêche en ant par une guerre des sexes amusante dans les années 60 (qui a dit que les hommes avaient toujours commandé ?), le film sait tirer parti de ses comédiens et de dialogues pagnolesques qui sont assurément les meilleurs écrits par Raymond Castans. Pour le coup, il est préférable d’aimer Fernandel et les fantaisies provençales dans lesquelles il a tourné pour apprécier un film qui tourne plus autour de lui que de Bourvil même si sa présence est évidemment une grosse plus-value.


Drôle, bien menée, voilà une fable amusante parfaitement interprétée par des acteurs cabotinant joyeusement pour assurer la couleur locale de l’ensemble. Si la fin du récit est plus bancale (mais lui trouver une résolution n’était pas chose aisée), on retient la bonne humeur générale et un rythme bien équilibré. Voilà un petit film avec deux grands acteurs qui vise tout à fait juste. On peut s’étonner qu’il ne soit pas davantage estimé, surtout lorsqu’on voit ce qu’on fait d’un pareil sujet aujourd’hui (cf. Pension complète).

8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également ajouté à ses listes Monomanie de comédies françaises

Créée

le 24 janv. 2022

Critique lue 171 fois

7 j'aime

11 commentaires

Play-It-Again-Seb

Écrit par

Critique lue 171 fois

7
11

D'autres avis sur La Cuisine au beurre

Une cuisine à prix modeste

Cette comédie fit sensation en 1963 parce qu'elle réunissait les 2 plus grands comiques d'alors, c'était assez rare à cette époque d'avoir au générique d'un film relativement modeste des vedettes de...

Par

le 21 août 2016

13 j'aime

10

Critique de La Cuisine au beurre par Alligator

aout 2012: Je peux me tromper, mais j'ai cru comprendre que ce film avait mauvaise presse en raison de problèmes relationnels entre Bourvil et Fernandel (je confonds avec un autre duo, un autre...

Par

le 20 avr. 2013

13 j'aime

6

Fernandel et Bourvil...

... What else ? Rien que pour la réunion d'un tel duo comique, il FAUT voir ce film. Le scénario d'un mari déclaré mort retourne dans son village retrouver sa femme, remariée, avec un normand qui a...

Par

le 16 nov. 2010

11 j'aime

1

Du même critique

La philosophie sur le comptoir

Aïe, aïe, aïe... L'arrivée de Fabrice Caro en lieu et place de Jean-Yves Ferri qui venait, à mon sens, de signer son meilleur Astérix dans le texte, était pourtant annoncée comme une bonne nouvelle...

le 15 nov. 2023

24 j'aime

22

Bottes de cuir sans chapeau melon

Le sujet de la proie aveugle n’est pas entièrement nouveau puisqu’il a déjà été traité dans, notamment, Seule dans la nuit quelques années plus tôt. Le parti-pris de ce film écrit par Brian Clemens...

le 18 nov. 2022

24 j'aime

4