Ils sont complexes les rapports entre l'artiste et le modèle qui se ent souvent dans de petits ateliers. Pour l'art, pour l'inspiration, l'artiste est contraint de dominer. Et ce rapport de domination saisit à feu et à sang le modèle lequel est réduit à sa plus simple expression. Enfin, cela serait normal pour tout être.
Le cas de belle noiseuse, avec ses tergiversations et ses résolutions minimalistes, complique nettement l'affaire.
C'est une femme. Une belle. Et on a beau contorsionner sa nature, pour la réduire en une peau de chagrin, sa nature est justement faite pour déranger le monde, elle est l'ambiguïté même. Rivette a eu le don de saisir ce qui se e dans cette atelier, à savoir est-ce l'artiste qui façonne, qui cherche ou est-ce le modèle qui fait l'affaire ? Est-ce du modèle dont émane l'art ? Et tout le talent de l'artiste, tout le talent du monde suffira-t-il à s'engager dans ce rapport de force ? Elle est nue de pratiquement tout le film, désirable : elle est à la fois soumise et moulin à vent.
Ce qu'il y a de plus troublant encore, c'est moins ce qu'il se e dans l'atelier que ce qui se e à l'extérieur qui importe et change en permanence la donne. Les personnages principaux ne sont pas très travaillés, pas façonnés mais le faudrait-il vraiment ? Pourtant il y a celle qui est déjà ée entre les mains de l'artiste, et qui est devenue une épouse qui, elle aussi, façonne... les animaux morts. Elle échappe à la vie parce que ce que ce rapport de force est un enfer. Avec sa condition artisanale, limite artistique, elle échappe à sa condition.
Pour finir, je vous encourage à regarder un tout autre rapport de force chez Romher dans "Le Beau Mariage".