Sorti dans une combinaison de salles lamentable probablement due aux mauvaises critiques américaines et françaises, j'avoue trouver hautement injuste le sort réservé à cet « Ombre du mal ». Non pas que l'on tienne un chef d'œuvre, mais difficile de comprendre un tel mépris pour un film honorable à bien des égards. Incontestablement le scénario aurait pu être plus dense, et cette idée de départ jubilatoire n'est exploitée qu'à moitié. De plus, John Cusack a beau faire de son mieux, il n'était pas l'acteur idéal pour interpréter Edgar Poe, à l'image d'une ressemblance physique plutôt approximative. Reste que le style James McTeigue, auteur de l'excellent « V pour Vendetta », a de l'allure et que malgré une dimension trop classique du récit, le divertissement reste habile et bien menée, comme en témoigne un suspense efficace de bout en bout et des dialogues plutôt supérieurs à la moyenne. Il faut dire que quand vous avez la chance d'avoir pour héros l'un des plus grands écrivains du XIXème siècle, il serait dommage de se priver d'une écriture à la hauteur de son talent ! Après, nul doute que celui-ci aurait pu être encore plus complexe et torturé, mais à l'image de la relation qu'il entretient avec l'Inspecteur Fields, celui-ci reste intrigant de bout en bout, aussi séduisant par sa dimension romantique que troublant par ses sanglants écrits. Les beaux décors gothiques et la photographie très sombre finissent de nous convaincre de la pertinence de l'entreprise, savant mélange entre pur fiction et faits historiques plaisamment détournés : imparfait donc (à noter un générique d'assez mauvais goût), mais infiniment supérieur à ce qu'on nous laissait entrevoir. Une bonne surprise.