La condition de l'Homme

C'est au coeur du Japon du XIème siècle que Kenji Mizoguchi nous immerge avec L'Intendant Sansho, pour y suivre le destin d'une femme mais surtout de ses deux enfants qui vont se retrouver esclave du terrible intendant Sansho.


C'est en 1954, peu de temps après Contes de la lune vague après la pluie, que L'Intendant Sansho est réalisé, où Mizoguchi met en scène une époque aussi fascinante qu'ambiguë, ainsi que le destin de deux enfants séparés de leur mère qui vont se retrouver sous l'emprise d'un maitre tyrannique. À travers ces deux personnages, et les relations qu'ils auront, notamment avec Sansho, il met en avant la cruauté humaine, l'exploitation de l'homme par l'homme, les humiliations ou encore le contexte d'une époque et notamment la condition des paysans, souvent exploités, avec des classes hautes n'hésitant pas à fermer les yeux, voire à encourager cela.


Tout cela, Mizoguchi le met en scène avec sobriété, faisant ressortir l'émotion et la dramaturgie des personnages et enjeux, et c'est bien là le plus important. Tout du long, il arrive à faire ressentir toute la pertinence et tristesse liée au sort des protagonistes, avec de nombreuses scènes mémorables à l'image du final. Une vraie puissance se dégage de l'atmosphère, à la fois mélodramatique, intense et humaniste mais aussi difficile, où Mizoguchi ne fait aucune concession, pour mieux faire ressortir les sensations et sentiments de la pellicule.


Il orchestre son oeuvre avec grand brio, avec une forte influence théâtrale qui se ressent à la fois dans la mise en scène mais aussi dans le jeu des acteurs (tous excellents et d'une grande justesse d'ailleurs). Il alterne bien entre les divers personnages, l'histoire et les émotions tandis qu'il dévoile une grande justesse technique, où chaque mouvement de caméra et cadre s'approche de la perfection, provoquant les effets voulus et participant à l'immersion dans cette époque et au plus près des personnages.


Une oeuvre d'une rare force et puissance, où l'émotion découle des personnages et enjeux dans un cadre aussi ionnant qu'ambigu et bien exploité. Ma deuxième expérience dans le cinéma de Mizoguchi et force est de constater que je ne suis pas près de m'arrêter là !

8
Écrit par

Cet utilisateur l'a également mis dans ses coups de cœur et l'a ajouté à ses listes Les meilleurs films japonais

Créée

le 28 mars 2016

Critique lue 1.7K fois

37 j'aime

4 commentaires

Docteur_Jivago

Écrit par

Critique lue 1.7K fois

37
4

D'autres avis sur L'Intendant Sansho

L'Intendant Sansho
10

Mizoguchi, cinéaste révolté

Deuxième Mizoguchi pour moi et deuxième claque dans ma figure, restons polie. D'ailleurs pendant que je vous écris je change tout de suite ma note d'un 9 à 10, mon côté grande âme sensible a pris le...

Par

EIA

le 27 août 2013

38 j'aime

22

La condition de l'Homme

C'est au coeur du Japon du XIème siècle que Kenji Mizoguchi nous immerge avec L'Intendant Sansho, pour y suivre le destin d'une femme mais surtout de ses deux enfants qui vont se retrouver esclave du...

le 28 mars 2016

37 j'aime

4

De la piété à l'humanisme

L'œuvre de Kenji Mizoguchi est difficile à aborder et L'Intendant Sansho n'échappe pas à la règle. Tout ici, par l'effort conjugué de l'intelligence la plus vaste et de la sensibilité la plus...

Par

le 12 oct. 2014

20 j'aime

5

Du même critique

American Beauty

D'apparence parfaite, le couple Amy et Nick s'apprête à fêter leurs cinq ans de mariage lorsque Amy disparaît brutalement et mystérieusement et si l'enquête semble acc Nick, il va tout faire pour...

le 10 oct. 2014

173 j'aime

35

Il était une fois l’espace

Tout juste auréolé du succès de Docteur Folamour, Stanley Kubrick se lance dans un projet de science-fiction assez démesuré et très ambitieux, où il fait appel à Arthur C. Clarke qui a écrit la...

le 25 oct. 2014

166 j'aime

53

La mort dans la peau

En mettant en scène la vie de Chris The Legend Kyle, héros en son pays, Clint Eastwood surprend et dresse, par le prisme de celui-ci, le portrait d'un pays entaché par une Guerre...

le 19 févr. 2015

154 j'aime

34