Un véritable tour de force que d'avoir gardé jusqu'au bout le choix de l'humour noir pour raconter cette histoire qui fait froid dans le dos. De la première à la dernière image, Herz ne dévie pas, même quand l'histoire plonge vraiment dans l'horreur.
C'est l'histoire d'un employé dans un crématorium qui va adhérer au parti nazi par opportunisme, et voir ainsi son niveau social s'élever. Il finira par obtenir un poste à haute responsabilité, grâce à son expérience et ses suggestions pour des crémations à grande échelle.
Vous comprenez à quel point c'était casse-gueule de faire de l'humour.
On est immédiatement captivé par M. Kopfrkingl et sa voix monotone. Mais malgré sa rondeur sympathique et sa voix rassurante, son sourire mielleux et son regard libidineux inspirent rapidement le dégoût. Ce n'est qu'un vicelard suant qui tripote ses jeunes employées et va régulièrement chez les putes derrière le dos de sa femme, tout en se vantant de ne pas fumer ni boire d'alcool. Un salaud ordinaire.
Ce qui est génial dans ce personnage, c'est son glissement très progressif du salaud ordinaire plutôt inoffensif du début au mec illuminé mégalomane de la fin.
La lente nazification de Kopfrkingl permet de er en revue les peurs et obsessions des nazis. Le bonhomme n'a pas besoin d'être trop bousculé pour adhérer au parti et commencer l'épuration de son entourage, même très proche. Ce qui le différencie du nazi qui le parraine, c'est son aspiration à libérer l'humanité toute entière de ses soufs et sa certitude d'être le nouveau dalaï-lama. Plus on est de fous, plus on rit.
Rudolf Hrusinsky, présent dans chaque scène et scruté en gros plan, est tout simplement extraordinaire.
Je ne sais pas si quelqu'un d'autre a remarqué, mais dans une scène où il prononce un discours pour l'enterrement de sa femme, il m'a rappelé de manière frappante Gian Maria Volonté dans "Enquête sur un citoyen au-dessus de tout soupçon" quand il fait son discours devant ses hommes. La scène est marquante, car c'est la seule fois du film où Kopfrkingl perd son calme. Comme Volonté, il commence avec une voix calme, puis il s'enflamme jusqu'à devenir effrayant. Il a exactement les mêmes intonations martiales, même si ce n'est pas la même langue. C'est sûrement une coïncidence, mais elle est troublante. Ou peut-être que les deux acteurs se sont inspirés de Hitler.