(petite réflexion sur les paradoxes temporels)
Bon, mettons les choses au clair, quand vous inventez une histoire avec un retour dans le é, vous avez quatre options.
- Première option : vous plongez votre explorateur dans une réalité virtuelle, une simulation (exemples : é virtuel (the thirteenth floor), Assasin's Creed)
- Deuxième option : vous imaginez un temps en plusieurs dimensions, ou plutôt un temps qui fourche, qui se sépare en plusieurs branches appelées "univers parallèles", et lorsque vous envoyez votre héros dans le é vous l'envoyez sur une branche distincte de la votre et de vos branches racines, du coup tout ce qu'il peut foutre comme bordel dans cette "copie" de votre univers, c'est pas votre problème.
- Troisième option : Celle du temps linéaire et modifiable qui change, qui évolue (qui évolue dans quoi ? y'aurait-il donc un métatemps ?).
- Et quatrième option : celle d'un temps figé qui contient une boucle temporelle immuable.
Les options 3 et 4 sont les plus dangereuses parce que vous allez vous vautrer dans une partouze de paradoxes temporels dont vous n'arriverez jamais à vous dépêtrer. Le simple fait de remplacer, dans le é, de l'air par un individu A devrait provoquer une réaction en chaîne qui modifierait légèrement la façon dont A a grandi ainsi que les conditions de l'expérience au cours de laquelle A a été envoyé dans le é. Ce qui modifierait légèrement le A envoyé dans le é. Ce serait donc, disons, un individu A' qui aurait été envoyé dans le é, ce qui modifie à nouveau par une réaction en chaîne tout le futur jusqu'à ce que A' soit envoyé dans le é : c'est donc en fait un individu A'' qui est envoyé dans le é, et ainsi de suite. Bref, au moment où vous envoyez votre individu dans le é, vous avez déjà un paradoxe.
Bon, on dira que je pinaille. On peut toujours se dire que votre présence dans le é n'impacte pas tant que ça votre vie avant l'envoi dans le é. D'accord, mais dans ce cas soyez malin et évitez de mettre grossièrement en présence un personnage avec lui-même dans le é, et évitez surtout qu'ils se regardent. Je sais que ça fait joli, que ça fait mindfuck ("Houa !!! en fait c'était lui quand il était plus jeune !"), mais ça tient pas la route.
Dans le cas d'une boucle temporelle préexistante et immuable (option 4), pourquoi réagiriez vous (adulte) exactement pareil que le vous-même vieux que vous avez vu lorsque vous étiez plus jeune ? Pourquoi n'auriez vous (adulte) pas une petite envie de foutre la merde et de faire autre chose, de dire autre chose que ce qui est prévu ?
C'est là où les scénaristes se plantent à chaque fois (les premières oeuvres qui me viennent à l'esprit : Harry Potter, le jeu Timesplitters - future perfect … Je suis sûr que vous avez aussi des exemples en tête).
Notons que l'hypothèse 3 n'est pas celle retenue par le film puisque ce qui donne l'idée au véritable "méchant" de créer le virus, c'est Brad, et c'est en fait Bruce venu du futur qui a donné l'idée à Brad. De plus, les types du futur disposent déjà (au début du film, avant que Bruce soit envoyé dans le é) d'un message téléphonique de la psychiatre qui atteste de la présence de Bruce adulte dans le é (c'est grâce à lui qu'elle connaît le numéro). Le film tente donc clairement sa chance avec l'option 4.
En fait, le film s'en sort presque. Il s'en sort grâce à l'idée du trou de mémoire : Bruce Willis se rappelle vaguement de la scène de l'aéroport, il a des visions, mais rien de bien précis et il n'arrive pas à faire le lien, ce qui lui permet de se comporter "naturellement" lorsqu'il arrive à cette scène une fois adulte et de se comporter toujours de la même façon, l'hypothèse d'une boucle immuable (4) tient donc à peu près la route.
Pourtant le film ne suis pas toujours cette hypothèse : en fait, le coup de la messagerie téléphonique du marchand de tapis fait tout tomber à l'eau, puisqu'au départ ils ne disposent pas par exemple du message téléphonique laissé par Bruce Willis à l'aéroport (vers la fin du film). Par contre, ils disposent bizarrement du message de la psychiatre, avant que Bruce ait été envoyé dans le é pour la première fois. Dommage, ça tenait presque la route !