La trame de L'Appât est simple : Cinq personnages (et uniquement cinq comédiens sont crédités) et une randonnée commune. De quoi donner à Anthony Mann de nombreuses possibilités pour exploiter cette petite et intrigante idée.
Il en tire un scénario assez malin, et exploite bien les personnages et enjeux, s'amuse de leurs différences pour faire avancer le récit. Il privilégie clairement la psychologie à l'action, délaisse les codes du western (face à face sanglant ou chevauchée spectaculaire, seule l'attaque indienne nous rappelle que l'on est dans ce genre) et propose une oeuvre efficace, laissant place à l'aventure et la mise en avant des failles, attitudes et humanité ou non des personnages.
Tourné comme un huis-clos en pleine nature, L'Appât bénéficie donc d'une écriture de qualité, mais aussi d'un metteur en scène inspiré, qui instaure une atmosphère prenante, brute et intense dans certains moments. On peut oublier un suspense finalement peu présent (ainsi qu'une finalité mal amenée) pour se concentrer sur le déroulement et des personnages forts, avec des liens intéressants entre eux, ainsi qu'une bonne gestion dans le temps accordé à chacun.
Anthony Mann se montre d'ailleurs assez habile pour gérer l'espace qu'il a à sa disposition, tout en le sublimant. Il nous plonge en pleine nature et use de tous les éléments, à l'image des roches sur les ages, des torrents ou encore de somptueux paysages donnant de magnifiques images. On a même l'impression d'être parfois au cœur des enjeux et au côté des personnages, qui bénéficient d'ailleurs de très bons comédiens à l'image de James Stewart, Janet Leigh ou encore Robert Ryan.
En signant L'Appât, Anthony Mann propose un western naturel et intimiste, se basant d'abord sur les personnages et une nature forte pour mieux nous imprégner de la psychologie de ceux-ci, sachant inclure une dose d'intensité et d'humanité dans l'atmosphère.