Jeune trentenaire, Fellini participa, avec des noms alors plus connus que le sien, à la naissance d'un cinéma nouveau, conscient. C'est ainsi que la voix off décrit les sketchs de cette œuvre néoréaliste s'inscrivant dans la lignée encore peu exploitée du docufiction.
Les personnages sont tous vrais, et pas des acteurs de cinéma, nous dit-on. Un choix qu'il faudra tout de même savoir différencier du cas où une personne joue son propre personnage dans l'adaptation d'un fait divers. On est dans un genre de réalisme jeune et dispersé, moral, conscientisant et quasi-journalistique qui s'attaque de front à des problématiques taboues telles que la pauvreté, le sexe ou ou le suicide.
Il n'est pas très légitime de rire de la manière très datée et donc prude dont ces tabous sont soi-disant "dévoilés" (c'était choquant à l'époque et un segment du film fut même censuré), mais ce n'est pas la seule occasion où la forme omet de servir le propos. Drôle de réalisme qui veut faire douter de ce qui est vrai ou faux. Étrange discours moraliste que de reconstituer une "vérité" dans un nuage de trucages.
Faillissant à remplir son objectif initial, L'Amour à la Ville s'est trompé de cadre. Socialement biaisé - ce dont son impact néoréaliste souffre -, c'est un film qui nous questionne toutefois sur les critères qui définissaient un bon jeu d'acteurs à l'époque. Car ces gens de la ville vivant des choses "vraies" répondent finalement aux mêmes normes comédiques que leurs plus illustres contemporains en matière d'actorat.
Ça, c'est son véritable intérêt documentaire, mais il a fallu au film des décennies pour le développer, alors que lui voulait s'adresser à sa propre époque. Non sans ironie, L'amour à la ville est un témoin de l'évolution de l'amour porté au cinéma.
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