« S’il y avait un Dieu, il ferait mieux de s’intéresser aux pauvres gens »

Suite à l’intervention du comte de Nansac, Jacquou se retrouve orphelin, subséquemment, il possédera des aspirations vindicatives.

Avec un aplomb stylistique confondant les oripeaux du mélodrame populaire et les fastes d’une fresque historique d’envergure, ce Jacquou le Croquant, adaptation d’une œuvre matricielle d’Eugène Le Roy, se dresse, malgré une indéniable filiation thématique avec d’innombrables récits de l’enfance malheureuse, comme une proposition cinématographique foncièrement prégnante. Loin de toute aridité conceptuelle, le métrage parvient, par une alchimie narrative subtile et une direction d’acteurs probante, à nous river viscéralement au destin de ce parvulus indigent et chétif, dont l’existence, initialement baignée d’une rusticité idyllique, est bientôt lacérée par la Mort, fauchant impitoyablement ses géniteurs.

Dans un paysage audiovisuel contemporain où les productions de cette étoffe se raréfient avec une désolante constance, le métrage de Laurent Boutonnat exhale un parfum suranné, une aura romanesque et épique qui, loin de toute mièvrerie, captive l’intellect et émeut le cœur. Le réalisateur, avec un sens aigu de l’observation et une probité artistique louable, dépeint la condition des indigents avec un naturalisme cru et sans fioritures, évitant avec une sagacité remarquable les écueils de la redondance et du poncif. On se surprend ainsi à éprouver une vive empathie pour ce jeune protagoniste, dont la fragilité initiale se mue progressivement en une force intérieure inextinguible, une résilience face à l’adversité qui confine à l’exemplarité.

Certes, l’intrigue, ancrée dans la rudesse du terroir et les injustices d’une époque révolue, n’offre pas une originalité intrinsèque à défrayer la chronique. Cependant, c’est dans le traitement, dans la somptuosité visuelle et la puissance émotionnelle distillée avec maestria, que le film acquiert ses lettres de noblesse. Il y a là une volonté manifeste de magnifier le trivial, d’ennoblir le prosaïque, conférant à cette histoire, somme toute élémentaire, une dimension quasi mythologique. Bref, cela s’avère être une œuvre attachante, un vibrant témoignage d’une époque et une ode poignante à la ténacité de l’esprit humain face aux tourments de l’existence.


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le 7 avr. 2025

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Trilaw

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