J'ai toujours eu une affection particulière pour Eric Tolédano et Olivier Nakache. Tous leurs films m'ont plu (certains plus que d'autres, quand même), et ils font partie des très rares réalisateurs français dont j'attends la sortie de leur nouveau titre avec intérêt. « Hors Normes » n'est sans doute pas parfait : l'équilibre comédie-drame est fragile, sa structure également, les deux compères voulant traiter énormément de choses en moins de deux heures. Mais globalement, quitte à laisser plusieurs pistes en cours de route, je trouve qu'ils s'en sortent plus que pas mal. Cette plongée dans le quotidien d'éducateurs spécialisés (et donc aussi bien des jeunes qu'ils forment que des autistes qu'ils accompagnent) est à la fois dense, chargée d'émotions sans être édifiante, les touches d'humour parsemant le récit étant aussi rafraîchissantes que bienvenues.
Dans cette perspective, le choix des comédiens s'avère souvent idéal, notamment Benjamin Lesieur, irrésistible dans le rôle de Joseph, l'impeccable duo Vincent Cassel - Reda Kateb (avec, peut-être, une très légère préférence pour le second, mais vraiment légère), tous les seconds, voire troisièmes rôles, ayant quelque chose à jouer à un moment. Rien n'est jamais trop facile ou acquis d'avance : même si les auteurs d'« Intouchables » restent d'éternels optimistes (à l'image d'un dénouement n'ayant, pour le coup, pas peur d'en faire), ils n'éludent pas le danger dans lequel peuvent se retrouver les uns et les autres ou encore le manque de moyens pouvant amener à des situations particulièrement graves.
On n'en oublie pas pour autant de nous offrir de vrais personnages, excellemment incarnés, donc, avec chacun beaucoup de personnalité :
Bruno et ses savoureux rendez-vous amoureux ratés, la répartie irrésistible de Malik, notamment devant ses « élèves » :
j'ai adoré ses moments, à la fois très drôle et donnant une véritable identité à chacun, quitte à être un peu maladroit, parfois
(l'ébauche de relation entre Dylan et Ludivine tourne quand même un peu court alors qu'elle partait joliment).
Il aurait presque fallu en faire une série, tant on a l'impression que Tolédano et Nakache avaient encore beaucoup à dire. Le temps e vite, et on aurait été heureux de suivre encore quelques temps nos héros, signe que ce « Hors Normes » reste une belle réussite, et une sacrée déclaration d'amour à ces héros de l'ombre, dont une bien plus grande reconnaissance serait plus que méritée. Sans doute l'œuvre la plus « grave » du duo, mais aussi une de leurs meilleures.