Étonnante prémisse que la proposition de Hana et Alice mènent l’enquête. Prequel en rotoscopie (cette technique d’animation qui consiste à dessiner en utilisant comme modèle de véritables prises de vue) d’un film avec des acteurs biens réels sorti il y a un peu plus d’une dizaine d’année, il est surtout l’œuvre du discret Shunji Iwai, cinéaste japonais notamment célèbre pour son poétique et énigmatique All About Lily Chou-Chou.
Difficile de décrire Hana et Alice mènent l’enquête tant Iwai aborde de nombreux thèmes, empruntant plusieurs pistes qu’il semble parfois abandonner en cours de route : meurtre, secte, vieillesse, amitié, rumeur, danse et dépression ; ce sont des sujets étonnement sérieux pour ce qui a été vendu – en tout cas en – comme un film tous publics.
Si on est d’abord pris de cours par l’énergie macabre et l’animation saccadée du long-métrage, Iwai trouve rapidement une parfaite alchimie. Il puise du dynamisme dans la simplicité, de la poésie dans l’anecdote bucolique – plus important encore, il écrit ses personnages avec ion. Les rapports qu’ils entretiennent sont complexes mais illustrés à merveille, par petites touches de dialogues ou même de mouvements. C’est ce même mouvement qui rythme Hana et Alice : perturbant de réalisme, il participe à l’établissement de cette atmosphère quasi-mélancolique, de ces situations intemporelles, de ce tracé perdu quelque part entre peinture et photographie.
Tout est simple, modeste ; l’émotion n’est ni trop grasse, ni trop subtile. Hana et Alice fait de sa retenue le pilier central de cette symbiose aussi niaise que cruelle, aussi intelligente que simplette. Une bulle de douceur qui s’agite avant de planer – une mélodie espiègle qui sait toucher dans la multiplicité de ses terrains de jeu.
Cela pourrait durer trois heures de plus, on ne trouverait pas le temps de s’ennuyer. Iwai sait tirer de cette banalité un lyrisme fascinant, il sait tirer de ses personnages un charme attachant, il sait faire de ces secrets de polichinelle des mystères enthousiasmants. Comme la vie, cela n’a finalement pas grand sens – mais là est le cœur de philosophie de Hana et Alice. A cet âge, tout est ionnant ; chaque balade en ville est une aventure épique, chaque rencontre une tempête infernale, chaque amourette le gouvernail d’une vie.