Jusqu'à ce que la mort nous sépare.
Mais quel pied, quel plaisir de voir un film noir aussi réussi ! Je vais commencer par dire que je ne comprends pas comment beaucoup voit dans Gone Girl une critique du mariage américain, c'est un film de genre et une telle intrigue a beaucoup plus d'intérêt et d'impact si elle se situe au sein d'un couple, marié qui plus est. Inutile d'y voir alors une féroce critique du mariage américain qui serait bidon, mais il faudrait plutôt se dire qu'il n'existait pas de meilleur cellule que celle-ci pour y placer une intrigue de film noir. Fincher, avec ses ambiances toujours très froides, ses éclairages doux, continue d'explorer son grand thème : la question de l'identité. The Game : tout est dans le titre. Fight Club, tout le monde y perçoit quels peuvent être les troubles de la personnalité. Seven : ce sont des traits de caractère qui sont mis en avant pendant tout le film. The social network interroge la question de l'identité dans ce début du XXIème siècle où la vie de chacun est exposée sur internet et Gone Girl, poursuit dans la même veine, et de façon très habile, en s'appuyant beaucoup sur une phénomène de société qui est la téléréalité. Les images qui nous submergent, comment les voir, les recevoir, les décrypter ? Le personnage de Ben Affleck est totalement façonné, construit et déconstruit par la télévision. Il l'est aussi par la police mais dans une moindre mesure, car elle-même est impuissante face aux médias et à l'opinion publique.
Nick et Amy sont un faux couple, et chacun est un acteur mais pour des raisons et dans des buts totalement différents. Nick est un homme qui ne se pose pas de questions, il n'est en fait pas particulièrement futé et c'est sa belle gueule qui, jusqu'ici, lui a permis de s'en sortir. Amy, elle, incarne la femme du film noir à la perfection. Elle est la femme poison, celle qui détruit l'homme, trop confiant, trop mâle, aveuglé par la beauté féminine, comme envoûté et qui est incapable de voir que cette femme fragile qui se blottit dans ses bras est en fait une véritable salope. Le jeu des identités est un pur régal dans Gone Girl et Fincher, tel un petit malin, s'amuse à nous manipuler, à nous balancer d'un bord à l'autre : "regardez comme aujourd'hui il est si facile de faire er untel pour le plus parfait des salopards puis comme un homme fragile et aimant". Mais, il faut bien se souvenir que Nick comme Amy ne sont nullement libres de leur jeu. Ils jouent à être ceux que la société veut qu'ils soient. On joue à être tels que nos parents souhaitent nous voir, tels que nos voisins désirent que l'on soit, nos collègues, etc, etc. Ici, Gone Girl étant un film noir, ce jeu est macabre et tourné vers le crime. On se délecte alors de ce jeu de pistes et des divers revirements de situations.
La fin ne peut être autre car le jeu doit continuer, Nick est faible, comme les héros de films noir et Amy, ne lâche jamais sa proie. Il n'y a que la mort qui ne peut les séparer, ou les libérer...