Femmes au bord de la crise de nerfs par Zogarok

C’est l’histoire d’une pauvre fille aux prises avec un mâle terroriste et d’une plaquée piquée au vif. Une entrevue avec l’avocate et quelques scènes avec Rossy DePalma bousculent cet opéra bordélique, confondant caméra automatique et brouillon de génie (la course finale de Mamy Destroy ressemble à du Gendarme & les Gendarmettes – mais en flashy). Dans cette overdose de kitsch, Almodovar s’amuse à mettre à nu les aspects névrotiques de ses personnages et ses aptitudes à cataloguer la gent féminine frisent avec l’insouciante insolence de ce tombereau de magazines féminins à la misogynie inconsciente et pourtant outrancière.

C’est sans doute cruel mais Femmes au bord de la crise de nerfs est un produit bariolé banal et même trivial. Ce kitsch flamboyant et transversal, que certains auront pu croire hors du temps et des âges, a pris un coup de vieux (que Priscilla folle du désert ne subit pas encore – ou, dans un autre genre mais aussi chromatiquement exalté, le cinéma d’Argento). Alors que la logorrhée de Kika par exemple, amusait davantage, étonnait aussi, ici tout est bavard en vain, vacant et superficiel, le film n’est traversé que de vieux débris et de personnages mal dessinés s’excitant seuls tout en étant encadrés par un scénario aberrant et cacophonique, sans grâce, presque potache et improvisé. Rien d’iconique ne se dégage (à moins que des réparties comme « J’adore les terrasses » tiennent du délire incandescent).

C’est du roman-photo, du soap girly en plus agité et avec un cadre et des étoffes, pas seulement luxueux, mais aussi d’un goût so glam couplé à un faste chiqué. Tout cela est imprégné d’une culture latine et méditerranéenne désuète, un peu trop 60s et Almodovar sans doute trop près de ses réminiscences d’enfant en mal de tantes hystériques ou de grandes sœurs initiatrices.

La séance est loufoque, survoltée, mais Almodovar et ses sbires se confondent dans une sorte d’exaltation systématique, donc inopérante. Une hystérie mécanique anime le film, d’ailleurs celui-ci simule au lieu d’exister, comme ses personnages sans doute. Mais le désordre de ces dames manque de raffinement et soit d’inspiration, soit de lucidité sur lui-même : la connivence béate ne peut être partagée que par un public amateur ou averti, acquis d’avance ou particulièrement demandeur. Haut-en-couleur, volontariste et dynamique, mais désespérément plat, un peu comme un histrion adolescent qui n’aurait rien à vendre mais se rattraperait compulsivement avec une danse du ventre improvisée. Presque intriguant, mais hideux et ennuyant néanmoins.


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le 4 août 2014

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Zogarok

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