Et si on vivait tous ensemble ? de Stéphane Robelin se propose de poser un regard tendre, presque idéaliste, sur une réalité souvent reléguée à la marge : celle du vieillissement. Le postulat de départ est audacieux et résolument humain : cinq amis, confrontés aux aléas de l’âge et au spectre de la solitude, décident de vivre ensemble pour briser l’isolement. Une initiative qui, sur le papier, sonne comme un manifeste pour la dignité et l’autonomie des aînés. Et pourtant, malgré son charme indéniable, le film laisse en moi une impression ambivalente.
Le traitement de la maladie, notamment celle de Claude Rich – incarnant un homme brillant peu à peu gagné par la démence – est sans doute l’aspect le plus poignant du film. Ce personnage, en perte de repères, offre quelques-unes des scènes les plus touchantes du récit. Malheureusement, cette dimension, qui aurait pu être un axe fort du propos, reste souvent en surface. La maladie est montrée, certes, mais rarement explorée avec la profondeur qu’elle mérite. On frôle l’intime sans s’y plonger vraiment, comme si le film n’osait pas troubler l’équilibre de son ton doux-amer avec une réalité trop brute.
C’est là que, selon moi, réside une certaine limite. Le film semble tiraillé entre sa volonté de rester léger et chaleureux, et la gravité des thèmes qu’il effleure. Le choix de ne pas sombrer dans le misérabilisme est tout à fait respectable, et même salutaire. Mais cette retenue finit parfois par sonner comme une esquive. On aurait aimé voir davantage les répercussions de la maladie sur le groupe, sur la dynamique de la colocation, sur les choix éthiques que cela suppose. Comment prendre soin de l’autre quand soi-même on faiblit ? Jusqu’où l’amitié peut-elle compenser l’absence de structures adaptées ?
Malgré cela, je ne veux pas occulter les qualités du film. Il y a une sincérité dans le regard de Robelin, une chaleur dans les interactions, et surtout une volonté claire de redonner une voix – et une vie – à des personnages souvent oubliés du grand écran. Les acteurs, tous remarquables, insufflent une véritable humanité à leurs rôles, même lorsque le scénario les contraint à des trajectoires un peu trop balisées.
Esthétiquement, le film reste sobre, parfois même trop. On sent que la mise en scène cherche avant tout à servir le propos, sans chercher à l’enjoliver ou à le troubler. Cela donne parfois une impression de platitude, mais cela permet aussi aux personnages d’occuper tout l’espace émotionnel. Et c’est peut-être cela la force discrète du film : laisser parler les corps, les visages, les silences.
En résumé, Et si on vivait tous ensemble ? est un film attachant, porté par une belle intention et des interprètes émouvants. Il aborde avec douceur des sujets essentiels, mais manque parfois de profondeur dans leur traitement. Le thème de la maladie, en particulier, aurait mérité un regard plus incisif, plus intime, plus engagé. Ma note de 6.5/10 reflète cet entre-deux : un film à la fois lumineux et frustrant, tendre mais timide, qui touche sans totalement bouleverser.