Mais quelle horreur de film ! Après les réussites de "Kirikou" et, dans une moindre mesure de "Azur et Asmar", il est difficile d'imaginer que Michel Ocelot puisse pondre un machin aussi détestable que ce "Dilili à Paris".
Réglons d'abord son compte à cette soi-disant "beauté" des images, qui semble retenir nombre de spectateurs quand il s'agit de "dire du mal" (c'est-à-dire écrire la vérité...) du film : Ocelot a photographié des lieux symboliques de Paris, des bâtiments intéressants architecturalement pour transmettre sa vision du début du XXè siècle, sur laquelle il a appliqué ses habituels dessins "à plat" et ultracolorés. Très rapidement, le procédé apparait pour ce qu'il est, une fausse bonne idée, qui ne traduit finalement qu'une défiance vis à vis des vertus du dessin comme art de la représentation et de l'imaginaire... ce qui est quand même un comble ! Si l'on ajoute certains dessins digitaux loupés - les affreux chevaux par exemple - il n'y a aucune véritable beauté à l'écran qui puisse compenser l'ineptie totale de ce qu'on nous raconte.
Car au niveau scénario, "Dilili à Paris" est un désastre pur et simple. Nous avons droit à une première partie en forme de visite guidée, qui se veut sans doute pédagogique, d'un Paris fantasmé où l'on croise le gratin de l'Art, du Spectacle et de la Science de l'époque, sans que ce "name-dropping" épuisant ne soit appuyé par le moindre élément factuel qui puisse contribuer à l'éducation, ou même à la réflexion de nos chères têtes blondes. Et comme tout ça est asséné d'un ton pédant et sentencieux, caractérisé par l'inable arrogance du personnage principal, une petite fille kanake élevée dans le luxe et les bonnes manières - à baffer, littéralement -, ce défilé de personnalités sert plus de repoussoir qu'autre chose vis à vis des "généreuses idées" progressistes, féministes en particulier que semble promouvoir Ocelot.
Mais, au moment où l'on ne pensait pas que cela pouvait être pire, Ocelot nous balance dans les égouts d'une mystérieuse conspiration des "mâles maîtres" destinée à asservir les femmes en les transformant en sièges (oui, en sièges !). On peut imaginer qu'il y a là, en particulier dans l'imagerie déployée une condamnation des intégristes musulmans, mais le tout est tellement ridicule, déplacé, anachronique, qu'on est littéralement effarés devant tant de bêtise. Bien entendu, Ocelot ne sait pas comment se sortir de ce pétrin narratif dans lequel il s'est lui-même fourré, et préfère abandonner son histoire en plein milieu, après un numéro musical d'une niaiserie disneyienne totale.
Si l'on était pinailleur, on pointerait aussi du doigt la vision méprisante du peuple parisien - sale, raciste, sans éducation - que seule l'aristocratie et la grande bourgeoisie sauraient sauver de l'abomination, mais il est inutile de charger la barque d'un film qu'il convient d'oublier aussi rapidement que possible, dès le générique de fin.
Une horreur, on vous dit !
[Critique écrite en 2021]