Sans doute un tantinet trop ambitieux pour faire mouche au cœur du spectateur ce film, mais peut-être le mix thriller à scénario tordu et rebondissant plus histoire d'amour tragique était-il particulièrement difficile à amalgamer. Avec un film qui plus est très imprégné de repères extrême-orientaux : le comportement des personnages, qui sans doute parle à un spectateur coréen, est parfois difficilement compréhensible pour le français que de base que je suis. Du coup, je reste sur un ressenti globalement positif, selon l'expression consacrée référence que seuls mes contemporains comprendront, mais je ne puis porter ce film au pinacle malgré toutes ses qualités.
Car des qualités, il en a, sans aucun doute. Un scénario policier aux petits oignons (faut quand même s'accrocher pour suivre), des images superbes et une maitrise technique qui ressort quasiment à chaque plan, une belle histoire d'amour tout en retenue et en pudeur. Parfois un peu trop pour ce dernier point d'ailleurs, on aimerait que nos deux protagonistes se lâchent un peu plus, parce que ça aurait peut-être pu leur réussir. Mais l'on devine aussi qu'ils évoluent dans une société où les rapports sociaux sont extrêmement codifiés et où il ne fait pas bon sortir de la norme, en définitive.
Le film est intéressant sur cet aspect là, d'ailleurs, et nous montre une société coréenne figée dans ses codes ancestraux (l'honneur, la place des femmes et tutti quanti) tout en exhibant une modernité de façade à base de gadgets technologiques. Le téléphone portable est omniprésent dans le film, on échappe fort heureusement à un branding agressif, alors que ça aurait vraiment plus que jamais pu s'y prêter. Une société violente - la violence revient périodiquement dans certaines scènes qui cartonnent - et qui repose sur une discipline et une rationalité effrayantes, incarnées par la femme du détective et son boulot de scientifique dans une centrale nucléaire. N'oublions pas qu'il s'agit d'un pays qui a tout de même réussi à suivre le déroulement de son épidémie de covid avec les applis des téléphones de ses citoyens. Une Corée fantomatique, nimbée de pluie et de brouillard, qui fait froid dans le dos du spectateur et ne laisse que peu de places aux échappées et aux sentiments.
Au point qu'en dépit du caractère poignant de la conclusion, je n'ai jamais senti monter en moi l'émotion parfois ressentie au cinéma. Comme si tout cela n'était qu'un conte fantomatique destiné à tomber dans l'oubli et à être englouti par les eaux. A moins peut-être que je n'ai pris la décision de m'en séparer...