Daniel
7.2
Daniel

Film de Sidney Lumet (1983)

"If they didn't arrest people, they'd have nothing to do."

"Daniel" est un film intrigant dans la mesure où on peut l'apprécier / interpréter comme un brouillon du chef-d'œuvre du récit d'apprentissage dramatique que Lumet réalisera 5 ans plus tard, "Running On Empty". Il y a pas mal de points communs, dans la situation familiale, à commencer par le poids de leurs engagements politiques que font porter (plus involontairement ici) les parents sur leurs enfants. Mais les limitations de ce film très marqué par sa décennie de production sont malheureusement très nombreuses, à commencer par les acteurs et la direction d'acteur, tous également catastrophiques. Timothy Hutton fait office d'une bien pâle copie de River Phoenix, et les parents (biologiques comme adoptifs) du protagoniste Daniel rivalisent de fadeur et de comportement / psychologie à côté de la plaque.


Et on imagine sans peine ce qu'aurait pu donner, dans de meilleures conditions, cette variation fictionnelle sur une base documentaire, à savoir le sort que connurent Ethel et Julius Rosenberg dans les années 50, deux juifs américains accusés d'intelligence avec l'ennemi communiste et condamnés à la chaise électrique en 1953. Le parti pris de s'intéresser plus aux enfants qu'aux principaux intéressés est très bon en soi, mais le point focal réalisé au niveau de cet adolescent sceptique enquêtant sur l'histoire de ses parents ne parvient jamais à concrétiser les pistes qu'il entreprend, qu'elles soient dramatiques, philosophiques ou historiques. Le portrait en creux fait du maccarthysme n'accouche pas sur grand-chose de conséquent, pas plus que les accusations d'espionnage, pourrait-on dire. Le fait que l'espionnage soit avéré ou non (dans le film on dirait que non mais dans la réalité il semblerait que ce soit le contraire) importe peu, ceci dit.


Les allers-retours entre années 30-40-50 et présent du film sont plutôt pénibles, incessants, avec dans un premier temps un filtre sépia très intense (et très moche) pour colorer le é, ce dernier s'atténuant progressivement à mesure que les époques se rejoignent. Un peu trop de sentimentalisme mal dosé dans cette diatribe dressée contre la peine de mort et la chasse aux sorcières, avec en toile de fond une famille qui tente de se réunir. Même le portrait des enfants qui tentent tant bien que mal (mais surtout mal) de se construire dans ce paysage émotionnel sinistré n'est pas très percutant. Lourd dans ses effets et un peu naïf dans ses intentions, même si la sincérité de la démarche ne fait aucun doute.

5
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le 2 mars 2021

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Morrinson

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