ça se sentait un peu en voyant la bande-annonce. Ho, voir le film me titillait. Et le voir actuellement, alors que nous regardons (Dieu merci, avec l'écart d'un océan) le délire et la chasse aux sorcières qui se déroulent actuellement aux Etats-Unis, est certes intéressant.
Le sujet, bien sûr, attire la sympathie : un génie doué pour l'écriture qui, pourchassé par le délire maccarthyste, arrive à déjouer la censure en écrivant sous des noms d'emprunt. Et arrive à remporter deux oscars en utilisant des prête-noms (pour Vacances romaines puis pour The valiant one).
Mais on s'est perdu en route dans la guimauve... La structure du film est trop évidente, avec la méchante Hedda Hopper en Mephistophélès anticommuniste qui veut faire plier Trumbo, et les proches et rares soutiens de l'écrivain de génie qui s'engueulent sous la pression, mais arrivent à cette apothéose, lorsqu'il reçoit le prix de la Writer's guild.
Et le sujet est parfois traité avec légèreté, toute la petite famille de Trumbo entrant dans la comédie des identités multiples qu'il prend pour vendre ses scénarii (et employer ses anciens camarades). L'hostilité du voisinage, les actes de malveillance et l'espionnage sont trop vite évacués, tout comme le contenu des convictions communistes de Trumbo : au fonds, on n'a pas l'impression de voir un compagnon de route de la révolution mondiale, mais plutôt un très bon dialoguiste avec des convictions sociales généreuses et des goûts domestiques un peu excentriques. Il n'a jamais tort (ses camarades sont là pour montrer divers types d'erreurs, de l'autodestruction à l'avillissement moral en ant par le reniement de soi. Mais pas Dalton, bien sûr.
Et le contenu des films de Trumbo, ce qu'il peut avoir de radical, tout cela est à peine suggéré, voire évacué. A croire que c'est juste l'histoire d'un gars qui était doué pour provoquer des émotions chez les gens, pas quelqu'un qui était en révolte contre la société de son temps.
Et c'est dommage. La reconstitution est bonne ; le casting tout à fait sympathique (même si les acteurs devant jouer the Duke, Kirk Douglas ou Edward G. Robinson font pâle figure en regard de leur modèle, mais bref). ça fait plaisir de voir Louis C.K., Elle Fanning, John Goodman bien sûr, et Alan Tudyk.
Bref, pas du tout un mauvais film, mais un de ces films qui se perd dans les sentiments plutôt que de traiter le vrai sujet. Avec un peu l'idée que "heureusement, tout ça c'est du é, heureusement ça n'a plus rien à voir avec l'Amérique d'aujourd'hui".
Well, guess what !