Ce film est tellement empli d'émotions. J'ai rarement vu l'enfance aussi bien filmée ...
Le rapport entre le rêve et la réalité et particulièrement bien traité, et on sait bien que l'enfance est la période durant laquelle les frontière entre ces deux mondes sont les moins étanches.
La petite Ana, 9 ans, est orpheline et elle est élevée par sa tante et sa nounou, aux côté de ses deux sœurs. Elle a été témoin de la mort de ses parents et revit très souvent ces scènes terribles d'agonie de sa mère ou de la découverte du cadavre de son père, peu après que la maîtresse de celui-ci ait quitté sa chambre.
Que de drames, que de secrets lourds à garder pour cette petite fille !
Il faut noter le regard sombre très particulier, le visage diaphane si émouvant de la jeune actrice Ana Torrent, dont c'est la deuxième prestation au cinéma, après L'esprit de la Ruche, sorti en 1973.
La mère est interprété par l'excellente Géraldine Chaplin, dont la fragilité émeut au plus haut point. Cette femme, profondément blessée par les infidélités de son mari, finira par tomber malade et décédera dans ces circonstances tragiques, percluse de douleurs.
Le contexte de l'Espagne post-fascisante des années 70, encore très patriarcale, encombrée dans les traditions et le pouvoir des militaires, est très plombant.
La petite fille vit au milieu de ses souvenirs, faisant revivre sa chère maman disparue, revivant les scènes de disputes conjugales de ses parents, les rejouant même parfois avec ses deux sœurs desquelles elle est très proche.
La solidarité fraternelle va sauver Ana de son désespoir, de ses idées sombres, ainsi que la relation très proche qu'elle entretient avec Rosa, la bonne, qui la connait depuis sa tendre enfance et est une mère de substitution pour la jeune orpheline.
Heureusement quelle a ça, la petite Ana, car sa tante qui les élève est assez froide avec les trois sœurs. Elle est notamment très exigeante, sur l'éducation, la présentation, le comportement que doivent avoir les filles.
Tous les acteurs sont formidables, des trois filles, à la mère, en ant par le père et la tante.
Parlons enfin de cette chanson leitmotiv : "Porque te vas" qu'Ana se ree en boucle sur un vieil électrophone. Un tube en Espagne en 1974, deux ans avant la sortie du film. La chanson représente une touche de modernité dans cet intérieur figé, où tout semble jauni par le temps, comme les photos servant de décorum à un é enfoui, mais regretté par la grand-mère, elle même posée là, figée comme le reste du décor. Pour moi, cette chanson est le symbole de la vie renaissante à travers ses douleurs, l'enfance, la nouveauté, l'imagination, contre l'immobilisme, la tradition.
Finalement, je relève ma note d'un point, ant à 9, car plus j'y réfléchis, plus je considère ce film comme un chef d'oeuvre.