Quelle étrange et indicible magie fait qu’un film parle, touche et étincelle ?
Une comédienne, une écriture, et sa pudeur, en l’occurrence, pour ce Copacabana.
Gentiment déjanté, le film gravite autour d’une Huppert radieuse et surprenante, esprit d’enfant dans un corps fripé, trop maquillée, avec un gout peu modéré pour les excès en tout genre. La vie est une succession d’instants, et se croque sur place, sans soucis des conséquences. Pure spontanéité, cette femme trace un chemin sinueux où les ants tombent souvent comme des quilles : des nues, ou sous le charme.
Mais au-delà d’un portrait atypique, Fitoussi parvient aussi à nous proposer une virée fraiche comme une pluie de printemps parmi les contrées assez désolées des laissés pour compte. Qu’on soit un quinqua à la recherche d’un emploi, une jeune fille sur le point de se marier ou une jeune cadre dynamique de seconde zone, de la même façon qu’on essaie de faire er un studio à Ostende pour une villa méditerranéenne, on est toujours un peu minable, on joue toujours un rôle qui sonne un peu faux, parce qu’on ne sait pas exactement comment s’adapter à ce système discrètement violent et aliénant.
Bien écrit, grâce à un sens du dialogue percutant et une véritable habileté à déjouer les pièges du pathos et des attendus du récit, le film touche au plus juste. Authentique sur le toc, émouvant derrière les maladresses, il fait d’Huppert une bonne samaritaine déglingos, de plus en plus attachante. En arrière-plan des destinées qui la voient avec un regard amusé ou agacé, elle est la souffleuse discrète du bien, à l’image de cette belle séquence où elle arrange les déboires de couple de son gendre au téléphone avec sa fille.
Il n’est donc pas surprenant qu’un film qui fasse du bien s’achève sur des allures de comédie musicale ; assumant jusqu’au bout sa fantaisie pétillante, le personnage et le cinéaste auront réussi le pari d’embarquer le spectateur.
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