Ce n'est qu'un au revoir
6.9
Ce n'est qu'un au revoir

Documentaire de Guillaume Brac (2024)

Jeunes et innocents

A l'aune d'un autre monde possible, Guillaume Brac s'attaque ici génériquement aux amitiés adolescentes. Le projet se veut d'ailleurs un diptyque, dont la deuxième partie "Un pincement au coeur" se déroule au Nord sur le territoire chaviré d'Hénin-Beaumont. C'est dire la part toujours politique que prennent les documentaires du cinéaste...


Revenons à la partie Sud, plutôt un long métrage en proportion, lorsque le deuxième ne fera qu'une trentaine de minutes. Nous sommes dans la Drôme dans le petit village de Die, dans un internat mixte. Ce sont les dernières semaines avant l'été, et surtout avant que chacun "vole de ses propres ailes". Qui à Madrid, qui à Grenoble, etc... Parcours Sup est é par là, c'est donc le temps des angoisses et d'une prochaine séparation. En substance...Qu'allons nous devenir? Et par extension, les uns sans les autres. Dans quelques temps que seront mes ami(e)s devenu(e)s? Nous goûtons donc avec ce petit groupe les joies et les peines de ces ultimes moments. Dans lesquels il faudra aussi er son bac...Même si le contrôle continu fait qu'aujourd'hui cela reste une pure formalité.


Et la magie opère toujours ...

Car l'écriture de Brac fait encore merveille de ce qui semble un simple matériau, à l'instar d'un autre barbu qui changea dit on l'eau en vin... Il donne sens, il en trouve aussi pourrait-on dire. N'a t-il qu'à se baisser dirait on...Mais il y a surtout de la bienveillance dans l'oeilleton de Brac, il y a un questionnement fait de patience et de curiosité, puis des vocations politiques qui naissent sous nos yeux, un combat pour demain....Bref, un attachement naturel aux "possibles". C'est d'ailleurs l'âge. Et il a une certaine science du groupe le lascar, du jeune groupe (L'île au trésor, Contes de Juillet ou A l'abordage affectionnaient déjà de jeunes protagonistes). Et dans une époque qui a placé depuis longtemps l'individu au centre de ses fonctionnements, cela fait sacrément du bien.


Brac circonscrit le "vivre ensemble" pour une population en devenir, il fait ici de cette petite communauté des citoyens futurs et rêvés d'un monde en péril. Ceci n'est pas montré d'ailleurs, c'est sous-entendu, car nous le savons tous... C'est à dire qu'il s'attachera plus aux combattants qu'aux victimes, plus aux militants naissants, plus aux jeunes pousses qu'aux drames présents ou aux vieux guerriers.


C'est en ça qu'il dessine un monde possible, c'est encore un manifeste. Par définition, son geste documentaire est aussi une promesse, un pari politique, une oeuvre de conviction. Il suffit de revenir à ses films précédents, et nous avons là une suite de "respirations naturelles", et qui sont pour l'avenir tout autant de parties de poker que de leçons de philosophie.


Rappelons nous à la fin cette chanson pleine de nostalgie... "Ce n'est qu'un au revoir", oui, et nous aurons peut être à vivre bientôt des temps troublés, séparés les uns des autres... mais nous voulons croire, absolument, que nous nous retrouverons. Avec la même candeur, la même vérité. Jeunesse éternelle !!


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le 8 avr. 2025

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ianov

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