Adaptation du roman de Rudyard Kipling que tout gamin (de ma génération, en tous cas) a lu et relu, les yeux brillants d'émotion. Le livre d'aventures par excellence où un gamin, gosse de riche inable, apprend la vie à son corps défendant sur un bateau de pêche. À la dure.
Ce n'est qu'il y a une dizaine ou quinzaine d'années, peut-être, que j'ai découvert le film de Victor Fleming, tourné en 1937. Le film force un peu le trait du personnage principal, l'enfant, en le rendant encore plus odieux (si, si, c'est possible …) et développe un peu plus le personnage de Manuel (Spencer Tracy) qui devient le mentor de l'enfant. Ceci rend le film un peu plus mélodramatique que le roman. Cependant, on retrouve bien grosso modo l'esprit général du livre qui est le parcours initiatique d'un enfant, né avec une cuiller d'argent dans la bouche, rendu aux vraies valeurs de la vraie vie qui commencent par le travail.
J'étais intéressé par revoir ce film après le "Empire du soleil" de Spielberg, histoire de comparer deux sales gosses. Mais, entre les deux "petits cons", je préfère celui de "Capitaines courageux". Certes, au début il est infect ; jusqu'au moment où il se prend une bonne mandale dans la gueule qui lui remet les idées d'aplomb. Puis peu à peu, il se civilise et devient un enfant digne d'intérêt, qui prend conscience du bon ordre des choses. Il finit même par dégager de l'empathie. Il est surtout crédible ou plutôt, devrais-je dire, le cinéaste l'a rendu crédible. L'acteur qui interprète le rôle, c'est Freddy Bartholomew qui n'en était pas à son premier rôle puisqu'il avait déjà interprété le rôle de David Copperfield dans le film de Cukor.
Mais "Capitaines Courageux" c'est surtout le personnage de Manuel, le pêcheur portugais, magnifiquement interprété par Spencer Tracy. Il habite son personnage (comme souvent, d'ailleurs). Il y a des scènes inoubliables notamment celle où, dans le "doris" avec l'enfant, il réalise que le gosse a salement triché. Et le gosse réalise, lui, un peu tard, qu'il a fait une énorme connerie déclenchant un sentiment rédempteur de honte.
Voir Spencer Tracy inventer et chanter des chansons enjouées avec sa vielle fait partie de ces petits plaisirs cinématographiques qu'on ne doit décidément pas louper. Il a reçu un oscar pour sa prestation dans ce film et il n'est pas volé.
L'autre personnage remarquable, c'est le capitaine du bateau de pêche joué par le truculent Lionel Barrymore. Acteur haut en couleur (dans des films majoritairement en noir et blanc…) qu'on retrouve chez Capra notamment. Une présence sur scène qu'on n'oublie pas.
La mise en scène de la vie à bord du bateau de pêche est très réaliste et elle aussi, très crédible. Comme si on y était. La préparation des appâts sur les lignes de pêche, les opérations de découpe et salage du poisson, les manœuvres des "doris". Il ne manque juste que la bonne odeur iodée de la marée…
La photographie du bateau pris dans la houle. Superbe.
Le cinéma de grand-papa, c'est quand même quelque chose … J'ai toujours l'impression d'en sortir grandi.