Il y a quatre ans, Les Misérables brillaient par l'efficacité à l'américaine de son récit, tourné vers la tension, pour un résultat des plus électrisants. Plus ample, Bâtiment 5 est aussi malheureusement plus confus. Plusieurs personnages se disputent la lumière et on peine à dégager la cohérence de l'ensemble, aucun parcours n'étant exploré de manière satisfaisante pour donner au film un cœur thématique.
Le point du vue du maire (joué par Alexis Manenti) semble accessoire tant on ne comprend pas ses motivations à agir de manière si brutale. Ladj Ly se désintéresse visiblement de ce personnage et semble l'inclure uniquement comme obligation contractuelle, pour montrer patte blanche. C'est dur d'être un maire facho, comprenez.
Le film embarque sa protagoniste dans une quête à mi-film qu'il n'explore pas. Et l'arc d'un personnage qui se révèle prépondérant dans la conclusion, apparait sous-développé, téléguidé par les exigences du scénario. Un film entier aurait rendu justice à son évolution aux enjeux complexes et ionnants.
Ladj Ly avait probablement l'ambition de réussir une histoire d'envergure au point-de-vue multiple à la The Wire mais, en cherchant à tout traiter en peu de temps, il ne développe pas assez.
Finissons sur le message politique du film, manquant cruellement d'épaisseur. En effet, Bâtiment 5 s'arrête à une lecture individualiste des évènements. Si seulement le maire était plus bienveillant... Il évacue du paysage le poids des structures, une lecture matérialiste de la société et la remise en question d'un cadre républicain vicié dès le départ.
Quand il rejette en bloc la violence comme forme d'expression, Ladj Ly enfonce des portes ouvertes. Il se garantit l'approbation des milieux petits-bourgeois de la blanche qui se gargariseront d'un discours bien aligné sur leurs intérêts. En présentant la voie électorale comme unique solution, il fait preuve d'un angélisme vertigineux. Pas à la hauteur.