Une panne d'électricité a annulé notre séance de House of Gucci au multiplexe, on s'est donc pointées comme des fleurs au cinéma d'Art et Essais, l'une disant "Oh super ils ent Au cœur du bois, je voulais le voir !" et l'autre (devinez qui) disant "Oh chouette !" en pensant à un joli documentaire sur les animaux de la forêt... En réalité, les cerfs et les écureuils attendront, Au cœur du bois s'intéresse à d'autres habitants du bois de Boulogne : les prostitué(e)s. Ce documentaire prend le parti d'interroger les travailleurs et travailleuses du sexe qui habitent dans des vans et ont vu leur profession évoluer en fonction des gouvernements, des lois, des changements d'habitudes des clients, de la police... On s'attache très vite à chaque personne interviewée, on écoute des parcours de vie très durs (regard de la famille, rejet, incompréhension, violence et jugement...), mais on découvre aussi des coulisses que l'on ignorait ("les proxénètes pour les travailleuses françaises, c'est obsolète !", "Bien sûr que l'on paye nos impôts, mais on n'a pas la Sécu !", ou encore toutes les pratiques humiliantes de la police pour empêcher les es... Et nous de tomber des nues). On ne compte pas le nombre de fois où l'on a ouverts grand les oreilles, pour mieux écouter "le travesti au parapluie", "la dame à la fourrure", "la dame âgée au sac à main rouge", "le travesti qui a trouvé l'amour avec une autre travailleuse du bois",... Vie privée, vie avec "les filles", déroulement des es, contraventions, contribution à la vie active sociétale, évolution du métier, tout est abordé, avec le plus grand respect et sans jamais être condescendant, ce que l'on a adoré. Le format court (1h25) permet au film d'être incisif, de distiller ses images paisibles du bois qui accompagnent les témoignages tout en finesse et vérité de ces misses, trans et messieurs. Au cœur des bois a été une très belle surprise, un coup du sort qui nous donnerait presque envie d'écrire des remerciements à EDF. On remerciera d'abord ces ionnantes travailleuses qui ont pris du temps pour nous faire partager leur expérience, avec un (très) fort capital sympathie.