Shakespeare World
5.8
Shakespeare World

BD franco-belge de Astrid De (2020)

Morceau de bravoure, mais...

Des travaux près de la tombe de Shakespeare dérangent les os du dramaturge, quand bien même une inscription menaçait de représailles toute personne les touchant... Et brusquement, tout le monde ne se met plus qu'à parler en utilisant des citations de Shakespeare.


La trame de l'histoire, à partir de là, suit des personnages multiples, sans que l'on arrive à bien la suivre. Il y a une spécialiste de Shakespeare, la seule qui au départ parvient à résister à la malédiction. Un grand méchant capitaliste à la Elon Musk (McBeth, évidemment) ; la reine d'Angleterre (dont je n'avais jamais remarqué que le masque de vieillesse la fait étrangement ressembler à Richard Nixon) ; et bien d'autres personnages que je ne citerai pas ici.


La trame noue des thèmes apocalyptiques liés à l'époque si sereine qui est la nôtre : émeutes raciales suite à la mort d'un automobiliste pakistanais ; gentrification et bunkérisation des riches ; aveuglement devant le réchauffement climatique qui occasionne ici des submersions crédibles ; barbarisation de la société ; et bien sûr, capitalisme décomplexé (encore que cela apparaît trop peu, mais les citations de Shakespeare ne s'y prêtaient sans doute pas ?


On irera le morceau de bravoure, car il y a beaucoup de citations qu'il a fallu trouver (on ne peut dénier une très bonne connaissance de l'oeuvre), et les lire pour servir une autre histoire a quelque chose d'amusant, mais rappelle aussi la force du verbe shakespearien. Cela donne envie de s'y replonger.


Le graphisme est efficace, avec des choix de couleur qui se tiennent. C'est dynamique, mais dans un style pas si personnel que ça. Ce n'est pas du Blutch, quoi. C'est bien dessiné, mais il manque un peu d'obsessivité, d'énergie sexuelle contrariée pour rendre cela fascinant.


Surtout, le livre est un peu trop long pour son propre bien. On ne s'est pas suffisamment attaché aux personnages pour se dire que l'on aurait aimé que cela dure 50 pages de plus. Au contraire. Il aurait fallu un peu plus que cette belle idée de départ.


Shakespeare World développe une idée originale, et aborde des thèmes dérangeants, mais il manque encore un peu de folie et de sublime, ou à défaut un plus grand sens de la concision pour faire un livre pleinement mémorable.

6
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le 24 avr. 2025

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zardoz6704

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