Un nouvel album de Guy Delisle est toujours un événement. Fauve d’or (prix du meilleur album) à Angoulême en 2012 pour ses Chroniques de Jérusalem, le Québécois est surtout connu pour ses récits autobiographiques dans lesquels il raconte ses expériences vécues dans divers endroits du globe (la Chine, la Birmanie ou la Corée du Nord). Mais avec S’enfuir - Récit d'un otage, c’est l’histoire d’un autre qu’il entreprend cette fois de raconter.
En mission depuis quelques mois dans le Caucase pour une ONG, Christophe André est enlevé dans la nuit du 1er au 2 juillet 1997. Faisant preuve d'optimisme pendant ses premières heures de captivité, il sombre petit à petit dans l'incompréhension, au fil des jours qui se succèdent. Attaché au radiateur d'une pièce vide par des ravisseurs avec lesquels il ne peut communiquer, ses longues journées se transforment en semaines, sans que rien ou presque ne se e. C’est ce "presque" que raconte Delisle pendant plus de 400 pages. Un récit à base de bouillons de légumes et de bruits de clés. Mais surtout le récit de la détresse d’un homme, coupé du monde et livré à ses pensées les plus sombres.
Un travail d'écoute que Guy Delisle a débuté il y a quinze ans avec Christophe André pour aboutir à ce huis-clos oppressant où ne subsistent que des détails. S'enfuir - Récit d'un otage est un album conçu comme un thriller où l’on tremble à chaque page pour le héros et où l’on ne s’ennuie jamais, malgré la quasi absence d'événements notables. Un exercice de style remarquable et ionnant.
Critique publiée sur Pop Up'.