Comme un con, je ne notais pas tome par tome. Ou bien, suis-je devenu un monomaniaque désœuvré, qui cherche à compiler tout ce qu'il ingère, en masse, multi-masse +7 même. Bref, je profite de cette fin de lecture tardive (plusieurs années entre les 6 tomes lus en quelques mois et celui-ci) pour faire à la fois un bilan général, forcément un peu flou, et un bilan un peu plus précis même si biaisé par le brouillard de ma mémoire quant au contexte des péripéties qui s'y déroule, de ce tome final.
Commençons par la fin : ce tome conclue donc les épopées homériques de Nausicaa et alterne moments intimes (le lien entre Nausicaa et son "fils"/créature Oma) et batailles rangées dantesques. Je vieillis peut-être, mais autant la première dimension peut me parler, autant les grands gestes me fatiguent un peu. Du coup, et comme il fallait bien conclure une histoire riche en lore, ce tome 7 semble assez chargé : on y retrouve deux pontifes comploteurs, on y fait escale dans un Eden illusoire, puis on finit par souiller le sacré temple de la résurrection. Vaste programme qui, malgré des planches qui assimilent la bédé franco-mobius, m'en touche une sans bouger l'autre, globalement. Car au fond, si l'idée d'un monde qui dépérit et renaît a quelque chose d'un grand mythe, il en prend ici aussi les aspects irréels. Alors que la relation ambigue, indéfinissable entre une Nausicaa Frankenstein et son Dieu de la Mort et de la Vie crééé a quelque chose d'insondablement beau, de simplement viscéral.
Dans mon souvenir, quoique imparfait et avorté, le film me semblait plus efficace, se perd moins en développements épiques superflus. Certes, il faut se farder la musique 80s ringarde et avoir pas mal l'impression d'une œuvre un peu laissé en jachère, mais le discours écologique y gagne en clarté et limpidité - même si, le tout sera bien plus accompli dans Mononoké. Car ce qu'on peut aimer ici : un lore développé à foison, une multiplication des personnages, clans et intrigues, m'a globalement paru un peu poussif et noyer le poisson discursif dans une mer de détails inutiles. Encore un peu manichéen, Miyazaki le jeune ne peut s'empêcher de glisser un message d'espoir et de dépeindre avec moins de nuances valeureux humains rédempteurs et vils corrompus de pouvoir. On sent pourtant l'influence de Dune, avec ce monde désertique où les ressources rares deviennent sacrées et certains cultes émergent, mais Herbert dépeint à la fois mieux le système anthropologique de son univers et s'avère bien plus intéressant dans sa manière de pénétrer dans la psyché retorse des mauvais. Reste un graphisme qui, c'est acté dans mon souvenir par une expo vue à Paris reliant les deux maîtres, s'inspire de Mobius et ose un découpage visuel assez audacieux. En résumé : un propos louable et malheureusement par trop prophétique, un design soigné et qui distingue déjà son auteur du tout-venant (mais son animation sera encore plus grandiose) mais un lore et une narration un peu foutraque et inutilement touffue, aux envolées lyriques pas toujours palpitantes.