Le premier tome de cette trilogie était une bonne bd. Bilal avait des choses à dire, des idées intéressantes à transmettre, et il usait de son dessin (assez sale volontairement) pour les illustrer.
Ce second est par contre une pure merveille, un chef d’œuvre de la bande dessinée, une œuvre d'art qui m'a séduit et apporté quelque chose de magique.
L'histoire ne raconte rien d'exceptionnel, on renoue avec les deux héros de la saga et apprenons à connaître Jill, une journaliste coiffure d'azur.
Le dessin a évolué entre-temps, gagnant en beauté magistrale dans les visages, les villes en ruine, les formes du chat Gogol, les paysages et surtout... pour l'héroïne, femme fatale bouleversante.
Finalement l'album touche une corde sensible en moi et j'ai énormément de mal à metttre des mots dessus. Il s'agit de gens paumés dans ce monde, qui avance pas après pas, le regard flou et l'esprit clair. Il s'agit d'un Nikopol qui prétend être fou pour échapper à monde qu'il ne comprend point, qui regagne la santé devant sa responsabilité. Impuissant de sa cellule face au retour d'Horus, il sera spectateur toute la première moitié, fantôme hanté par ces cauchemars de réalité. Puis se lèvera pour faire face.
Il s'agit d'Horus, dieu rejeté par les siens, paumé également qui déchaînera sa frustration dans des massacres. Et comme deux paumés s'entendent mieux ensemble, ils se retrouveront l'un en l'autre. Fusionnant leurs manques et leurs défauts pour se comprendre et avancer ensemble, peu importe vers où, peu importe pourquoi. Il s'agit d'avancer, d'échapper à cette pyramide symbole de fatalité.
Il s'agit de Jill, journaliste dont le sujet d'étude n'a pas plus de sens que sa propre démence dans laquelle elle sombrera davantage à chaque pilule. Il s'agit de drogue, du symbole qu'elle représente, l'échappatoire à un monde sans sens, il s'agit de drogue, de la pire solution à un problème sans fin, du monde halluciné qu'elle crée de toutes pièces et vient se mêler au réel pour enlever définitivement le moindre sens à ce que le lecteur lit et ire de ses yeux écarlates.
Il y a quelque chose d'inaccessible dans cet album, quelque chose d'incompréhensible. Les héros avancent sans plus saisir leur histoire que nous, le rouge et la mort envahissent ces pages pour finalement se retirer sur le retour d'un mystérieux individu. Et le trio avance, oubliant cette aventure, tournant la page vers une nouvelle guère plus normale à n'en point douter. Et le lecteur les suit...