Il en faisait un peu trop, le mec nommé Mentallo
Flex Mentallo est une création de Grant Morrison dans Doom Patrol, un titre Vertigo mettant en scène une équipe de super-héros anormaux. Parodie des pubs Charles Atlas pour le développement physique, ce personnage doté du pouvoir du "Mystère de Muscle" avait fini par rencontrer dans les pages de Doom Patrol son créateur, le scénariste de comics Wally Sage ! Grant Morrison mettait en scène une de ses obsessions : la métafiction, car Wally Sage n'est pas un simple scénariste, il possède des pouvoirs psychiques qui ont donné existence tangible à Flex Mentallo.
En 1996, en plein âge sombre des comics, G. Morrison s'associe pour la première fois avec Frank Quitely, collaboration poursuivie par la suite sur Nou3, New X-Men et Batman & Robin, sur une mini-série en 4 épisodes mettant en scène le culturiste de plage, et poussant encore plus loin la réflexion sur l'impact des super-héros sur la réalité. Flex Mentallo se met en quête de son vieil allié le Fait, alors qu'une conspiration menace de faire disparaître le monde. Dans le même temps, Wally Sage tente de mettre fin à ses jours et se confie à SOS Amitié
Il s'agit d'un manifeste de l'auteur en faveur de l'âge insouciant des super-héros. L'histoire se mêle d'éléments autobiographiques (quand Wally raconte l'impact qu'ont eu sur lui dans sa jeunesse les récits de super-héros) et il faut bien s'accrocher (ou relire plusieurs fois comme je l'ai fait) pour ne pas perdre le fil du récit, entre fiction et réalité. Mais la fiction et la réalité sont-elles bien celles qu'elles semblent être ? Et si c'était le monde des super-héros la réalité ? Les références sont très abondantes, et les 4 épisodes autant de relectures des âges des comics (le dernier épisode étant une conclusion satisfaisante pour l'auteur alors qu'on est encore en plein âge sombre).
Un récit sans temps morts, sans moralisation ou "francis cabrelisme", même si on sent tout de suite les sympathies de l'auteur pour l'Age d'Argent et son mépris pour l'Age Sombre (considéré comme une phase d'adolescence, où les héros et héroïnes ultra-sexuées finissent par crever en partouze). Le dessin de Frank Quitely est au sommet.
Une lecture très complexe, déstabilisant, mais indispensable pour comprendre les motivations de G. Morrison quand il écrit des comics : les super-héros sauveront le monde réel.