Artiste que j’ai découvert sur deux pistes de l’album Nothing Was The Same de notre ami canadien Drake, Sampha était jusque-là presque inconnu pour moi. Bien que l’ayant trouvé très bon dans ses ages sur Motion et Too Much issus de cet album, je ne m’étais pas penché sur la discographie de l’artiste. A vrai dire, son côté beaucoup trop Soul me laissait penser que je me lasserais plutôt rapidement à l’écoute d’un projet solo. J’ai quand même sauté le pas pour me faire un avis concret sur la question. J’ai bien fait !
Effectivement, cet album Process est un bijou. Format idéal avec 10 tracks, pas de répétition, une variété musicale suffisante pour éviter l’ennui, Sampha nous propose un produit final très séduisant. Décidément, le Royaume-Uni est un vivier incroyable d’artistes en tout genre.
Le projet démarre avec Plastic 100°C qui est un son dévoilant les inquiétudes connues par Sampha lorsqu’il a appris la présence d’une tumeur (ou du moins d’une grosseur anormale) dans sa gorge il y a quelques temps, chose qui a touché ses proches et notamment son père et sa mère, respectivement décédés lorsqu’il avait 9 ans et en 2015. Il y relate également la pression relative à son exposition médiatique ne cessant d’augmenter suite à ses bonnes performances, d’où ce titre métaphorique. S’en suit Blood On Me, son promotionnel de l’album qui change de rythme. L’artiste tente de nous faire ressentir ses angoisses les plus profondes, le refrain, selon lui, étant le moment où il réussit à se tirer de ces cauchemars. L’instrumentale et la voix sont une nouvelle fois maîtrisées, on adhère. Dans un rythme semblable au titre précédent, Kora Sings intègre, comme son nom l’indique, la Kora qui est un instrument de musique à corde africain. Une nouvelle fois, plusieurs références sont faites à sa difficulté à accepter la disparition de sa défunte mère.
Arrive enfin la piste phare de l’album, peut-être la plus calme mais la plus touchante à n’en pas douter. (No One Knows Me) Like The Piano est typiquement une balade. Une très belle balade. Celle-ci relate les bonnes conditions dans lesquelles il a vécu pour développer son talent artistique. Il a été soutenu sans faille, par sa mère notamment, dans son projet de devenir un artiste à part entière. Pour la petite histoire, il s’agit de la dernière musique qu’il a chantée devant sa mère, et également celle qu’il a choisi d’interpréter pendant les funérailles de celle-ci. La track suivante Take Me Inside est plus courte, encore une fois axée sur le piano et les vocalises de l’artiste. Constituée de deux parties, la chanson semble parler d’une rupture amoureuse où il semble accepter que l’histoire se termine.
Des sonorités plus contemporaines, pour ne pas dire électroniques, s’écoutent sur Reverse Faults. On perçoit l’utilisation d’un synthétiseur et le rendu est plutôt bon. Mon anglais moyen ne me permet pas de percevoir toutes les métaphores utilisées par Sampha dans le son, mais il semblerait que l’idée générale soit une sorte de mea culpa sur toutes les fautes commises par l’artiste dans sa vie, sur lesquelles il a pourtant blâmé les autres dans certaines situations. La piste suivante Under contient, elle aussi, des sonorités différentes de la première moitié de l’album et souligne la variété que j’expliquais en introduction de la critique. L’artiste met en avant le pouvoir de séduction que peuvent avoir les femmes sur les hommes. Il semble perdu et tiraillé entre plusieurs sentiments à cet égard. Arrive ensuite Timmy’s Prayer, son co-écrit par Kanye West et qui a marqué le retour de l’artiste au premier plan après quelques années de galères entre les brouilles avec son frère (qu’il cite dans la piste) et les problèmes de santé de sa mère. Le refrain est excellent.
Incomplete Kisses reste mon morceau favori, c’est le plus R&B de l’album et cela montre la polyvalence de son interprète qui semble à l’aise sur tous les terrains. Sampha explique qu’il n’est jamais nécessaire de trop se prendre la tête lorsque nous sommes dans un relation, que l’idéal est de laisser parler ses réels sentiments sans prendre compte de certains éléments externes perturbateurs. A vrai dire, j’acquiesce entièrement. L’album se termine de façon plus calme que les 4 précédentes pistes avec What Shouldn’t I Be. C’est une track qui relate les fractures qu’a pu connaître l’artiste avec certains membres de sa famille quant à son orientation dans la vie.
Ce projet est définitivement une surprise pour moi. Il a su me toucher tant sur le plan émotionnel avec des lyrics très personnels que sur le plan musical où j’adhère à une quasi-majorité des sons que l’on retrouve sur l’album. Un excellent travail qui me donne vraiment envie de revoir Sampha à l’œuvre dans ce même registre.