Quand on a une voix, on a deux choix : s’époumoner à chaque titre, si possible sur le refrain qui va bien, ou alors la retenue tout en technique. Jorja a fait son choix : une émotion contenue mais réelle, une voix somptueuse et une technique sans faille.
Pour un premier album il y a pire, mais on a également vu mieux car même si les sons sont très biens produits, on ne peut pas dire que l'originalité et la créativité soient mis à l'honneur, rien ne dée, tout reste dans le cadre. Autant sa voix est une formidable courroie de transmission d'émotions, autant la musique reste d'un classicisme absolue : les références et influences soul, jazz et R'n'B sautent au visage mais manquent de relief, de tripes et de caractère. Cela peut se comprendre: la peur de l'échec compensée par le travail, en restant mainstream on a au moins le mérite de ne pas se mettre hors jeu. Pour autant l'album sert véritablement d'écrin à sa voix chaude, sensuelle, langoureuse limite lascive (ok j'arrête..) avec sa tessiture très particulière, loin du coté bête sexuelle et outrancier d'une Betty Davis mais pas si loin d'une Minnie Ripperton ou d'une Millie Jackson.
Bref, cet album apparaît comme une très belle promesse au regard du talent de la miss, l'oeuvre est homogène, les textes variés et inspirés, et si les astres s'alignent le meilleur est à venir (pour les curieux, jetez un coup d’œil à sa session au tiny desk concert).
Je sais bien que la comparaison avec Amy Winehouse peu paraître facile (jeune, anglaise, culture métissée, fan de musique black) mais elle me semble néanmoins pertinente car je trouve que cet album ressemble beaucoup à "Franck", le premier album d'AW. En effet, sur Franck, Amy montre l'étendu de son immense talent vocal mais musicalement l'album oscille entre différents styles r'n'b, jazz, soul, pop sans en cre ni en imposer aucun et à la fin de l'écoute seule la voix d'Amy nous imprègne. Probablement un mal pour un bien.
La rencontre avec Mark Ronson et la maturation de son talent permettront à Amy de vivre son rêve ultime de devenir la Etta James des 2000's, de s'épanouir et d'exploser mondialement et irrémédiablement.
Désormais je n'attends plus qu'une chose : que la belle rencontre son Mark Ronson car elle mérite largement un écrin à la "back to black" en espérant que la fin soit plus lointaine et moins triste....