24 ans après un des albums les plus marquants de son époque, Quicksand revient pour se rappeler à notre bon souvenir — non pas qu’on les ait jamais oubliés, Slip est un album essentiel qu’on prend toujours plaisir à réécouter — mais le sieur Walter Schreifels était depuis longtemps é à autre chose, que ce soit avec le très college radio Rival Schools ou plus récemment avec Vanishing Life.
Il n’est jamais facile pour de tels précurseurs de revenir après tant d’absence, l’exercice est toujours périlleux et la crainte d’écorcher le mythe est plus forte que tout pour les fans. On sait déjà d’avance qu’ils ne révolutionneront plus le genre, que le témoin à des groupes comme les Deftones - dont Sergio Vega le bassiste fait d’ailleurs maintenant partie — a été é il y a belle lurette, c'est à dire à la fin des nineties.
On peut toujours questionner les intentions derrière un tel come-back, d'autres monstres sacrés comme Polvo ou Dinosaur Jr ont réussit la prouesse de revenir plus forts que jamais, forts d'une seconde jeunesse, en faisant plus que rester fidèles à leur empreinte musicale et en proposant une continuité inespérée et inspirée à leur public fidèle. Un bon cru qui aura mûrit tranquillement et dont les arômes vous explosent les sens.
Alors oui, dès les premiers morceaux, on retrouve un peu nos marques, mais Quicksand nous présente ici une version beaucoup plus édulcorée des classiques de l’époque.
Rien qu’au titre de l’album, on se doute que l’introspection risque de faire place à la tension omniprésente de leur prime jeunesse, et si on réécoute bien les vieux titres comme Dine Alone, les ages atmosphériques ne sont pas chose nouvelle chez nos amis New-Yorkais.
La différence est que sur Interiors le temps tourne au ralenti, les guitares se font moins incisives, on ne ressent plus la même urgence vindicative et l’exutoire si salvateur de leurs débuts. Schreifels, à présent à l’aube de la cinquantaine regarde sûrement les choses de manières plus distante. Il y a bien quelques fulgurances mais elles restent assez brèves et peineront à réveiller les foules en concert. Non pas qu’on en soit à espérer que le public reprenne les nouveaux morceaux en cœur, et on se dit que c’est sûrement un mal pour un bien.
La maturité rend l’ensemble plus diffus(-able?), plus lisse, ça vient quand même vous caresser dans le sens du poil, comme la nouvelle scène émo à la Pity Sex ou Adventures, avec qui Will Yip, aux manettes de la production, a bossé auparavant. Quicksand n’a jamais renié son amour de la pop, sans pour autant vouloir se transformer en groupe de shoegaze. Le talent du quatuor fait que les compositions et la production sont suffisamment bien travaillées pour qu’on prenne plaisir à retrouver ce son indélébile, cette sourde puissance, doucement explosive à l’instar de leurs géniaux et éternels alter-ego, Tool.
La voix de Schreifels continue de nous guider dans la pénombre. En pleine débâcle politique, le doute et la peur sont plus que jamais présents aux USA, aussi Quickand a-t-il peut-être ressenti le besoin de continuer à porter le flambeau d’une scène qui en son temps s’opposait frontalement au pouvoir politique en place, Fugazi en tête.
Ce voyage intérieur mérite tout de même le détour, et il est bien agréable de se plonger à nouveau dans les méandres tortueux de ces compositions savamment construites, quitte à sombrer dans ses sables mouvants, pour mieux lever la tête et constater que les étoiles brillent toujours, que les feux d’artifices nous éclairent dans la nuit noire.
L’étincelle est toujours là, forcément moins vive qu’hier, mais cela suffit pour nous guider et nous aider à garder le cap. Walter n’est pas devenu un monstre - comme dans l’album éponyme des aventures de Lapinot - bien au contraire, son humanité est plus que jamais manifeste sur cet album qu’il faut prendre le temps d’explorer, comme tout bon grower.
Schreifels démontre avec facilité qu’il reste à jamais une des personnalités majeures d’une scène qui fait cruellement défaut à la génération actuelle. Prenez-en de la graine.