Robert William Paul est un des pionniers du cinéma souvent oublié à cause de contemporains plus généreux ou mieux reliés. Il a opéré en marge de l'école de Brighton, menée par George A.Smith et James Williamson, qui a engendrés des centaines de films courts, dont plusieurs sont des étapes cruciales dans le développement des techniques fondamentales (très gros plan avec La Loupe de grand-mère).
En 1894, alors que le kinétoscope d'Edison est plébiscité, le kinétographe que l'homme aux mille brevets a inventé est contrefait en Europe. C'est d'autant plus simple qu'à l'étranger il est libre de droits : Robert W.Paul fait partie de ces pirates, d'abord sur commande, puis pour être lui-même réalisateur. Il créée alors la Kinetic avec l'ingénieur Birt Acres et tourne ses premiers films dès 1895, destinés à être vus via son substitut de kinétoscope et donc pour une clientèle réservée.
Mais le cinématographe arrive de en 1895 et ses « vues » rendent déjà obsolète le kinétographe. Edison, auquel l'ensemble des 'découvreurs' de ces années-là doive (apparemment) beaucoup, est donc déé mais même le révolutionnaire cinématographe n'atteint pas encore son but ultime : la réunion de l'image animée et du son. Si l'avènement du parlant est incarné par Le chanteur de jazz, premier long-métrage à l'exploiter, des expériences sont tentées avant – dès les alentours de 1910, avec insuccès ou en se heurtant à des intérêts commerciaux.
Pas concerné par le Graal du cinéma primitif, Robert W.Paul s'illustre par quelques faits remarquables et sa place 'd'avant-garde'. Dès février 1896, il construit son propre appareil de projection pour rattraper les Lumière (leur première projection publique date du 28 décembre 1895) : le Theatograph. Aussi nommé 'animatograph', c'est le second projecteur historique, révélé au public dans le Egyptian Hall au Picadilly (Londres), le 20 février. Il attire rapidement les foules, les visionnaires et les concurrents ; c'est le responsable des liens importants entre Paul et le français Georges Méliès, dont l'ascension fulgurante démarrera dans l'année avec l'import sur le grand écran de ses trucages (dans Une partie de cartes) avec cette caméra.
Robert W.Paul sera principalement producteur et fait construire dès 1896 son propre studio. Il travaille notamment avec Walter R.Booth (Scrooge or Marley's Ghost, The Haunted Curiosity Shop, An Over-Incubated Baby, Artistic Creation). The Countryman ant the Cinematograph fait partie de la trentaine de films pour lesquels il se fait réalisateur (c'est modeste par rapport à ses principaux concurrents). Projeté en 1901, ce film-éclair (il en reste une vingtaine de secondes, il serait en partie perdu – mais Paul fait généralement très court) propose le premier 'film dans le film' (un an après les points de vue subjectifs chez George A.Smith – L'Astronome indiscret). Un badaud (« the yokel » dans le catalogue de Paul) s'y exalte devant un écran de cinéma, dans un contexte assez luxueux a-priori.
Le second des trois extraits renvoie à la fameuse anecdote à la gloire du cinématographe : la réaction du public face à A Chess Dispute. Les contributions de George A.Smith comme Le baiser dans un tunnel (1899) sont plus sophistiquées, mais celle-ci amène une prise de conscience d'autant plus violente du champ des possibles offert par le cinéma. Le champion de l'école de Brighton réalisera un remake en 1902, tout aussi railleur : Uncle Josh at the Moving Picture Show.
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