Difficile pour moi de ne pas lire Murmures sinon comme le plus faible des volumes de Walking Dead jusqu’à présent, du moins comme le plus bâclé. Construit autour de la figure de Carl, on n’y trouve logiquement une exploration du thème de l’indépendance d’un ado qui, en gros, trouve un métier et perd son pucelage. Pour le lecteur, cette double initiation erait comme une lettre à la poste, voire serait convaincante, si elle s’articulait avec le cadre général de la série et qu’était traitée avec un minimum de subtilité.
C’est précisément là que ça se gâte. D’une part – et c’est le moindre des deux maux qui accable Murmures –, on en finit par perdre de vue que la survie est censément la question centrale de Walking Dead, car on se perd dans des intrigues de pouvoir qui sont au mieux des disputes de cour de récréation disproportionnées, au pire des clichés empruntés aux plus médiocres des feuilletons – le coup du poison dans le verre, oui. D’autre part, et c’est là que c’est le plus gênant, on n’y croit pas une seconde.
Je consens à ce que notre orphelin-puceau-borgne-fils-du-chef, pour être un dur à cuire, n’en soit pas moins ado – et qu’à ce titre les hormones le travaillent. J’ets encore que le personnage de Lydia ait de quoi être perturbé psychologiquement, affectivement, moralement, etc. Et dans ces conditions, je veux bien que le demi-viol (1) qui constitue l’initiation sexuelle de Carl puisse à la rigueur avoir quelque vraisemblance.
Là où le bât blesse, c’est que Lydia est faite prisonnière page 37, discute avec Carl page 68, reçoit de lui un cadeau page 94, le voit pour la première fois page 97, l’embrasse page 114, lui prend sa virginité page 116 et retrouve sa liberté page 132. En une journée. Pour un si court laps de temps, c’est clairement trop. (Par comion, je n’insiste pas sur l’évocation du dépucelage proprement dit : en pleine page, deux mains tes sur le chapeau de Carl posé dans l’herbe… Le genre de sous-entendus si insistants qu’il produit le contraire de l’effet recherché.)
Parallèlement, en se centrant sur Carl, le scénario de Murmures néglige l’intrigue générale, à laquelle il ne se raccroche qu’au pris d’un certain nombre de redondances concernant les quislings, que la série préfère appeler chuchoteurs.
(1) À ceux que le mot viol gênerait, je rappelle qu’en termes légaux, un viol peut tout à fait être commis par une femme / fille sur un homme / garçon. Demi, c’est parce que j’ai du mal à croire à un consentement réciproque quand l’un des partenaires dit « D’accord » après un silence et avec les yeux exorbités (p. 116).
Critique du tome 22 là.